Canal+ Cinéma a diffusé récemment « À son image », film réalisé en 2024 par Thierry de Peretti d’après le roman éponyme de Jérôme Ferrari.
Dès l’adolescence, Antonia (Clara-Maria Laredo) s’est passionnée pour la photographie. Elle aime saisir sur le vif le visage de gens ordinaires quand ils interagissent au sein d’un groupe.
Âgée de vingt-deux ans, elle est embauchée par le quotidien Corse-matin comme photographe. Elle est tombée amoureuse de Pascal (Louis Starace), militant du Front de Libération Nationale de la Corse (FLNC). Ces deux événements la mêlent intimement à l’histoire tourmentée de l’île. Nous sommes dans les années 1980-1990.
Le mouvement nationaliste corse prend un tour de plus en plus violent. De quoi peut rendre compte une photographe ? Elle qui est fascinée par les visages ne peut capter ceux des militants clandestins. Ses photos d’une conférence de presse tenue par des militants cagoulés ne sont même pas retenues par le rédacteur en chef.
Antonia quitte Corse matin et part seule couvrir, aux côtés des soldats serbes, à visages découverts, le siège de la ville de Vukovar en Croatie. Mais là aussi, de quoi rendre compte ? Les pellicules ne sont bonnes qu’à brûler. Inrockuptibles évoque la capacité ou non des images à immortaliser le réel et la part d’obscénité de cette entreprise.
En Corse, la dérive du FLNC s’accentue. On élimine maintenant des camarades car on les suspecte de pouvoir trahir, à titre d’autodéfense préventive, sinistre oxymore. Les femmes de militants tentent de les ramener à la raison, de leur donner envie de construire une famille. Lorsque Simon (Marc’Antonu Mozziconacci) demande à Antonia de garder l’enfant conçue d’une relation qu’elle ne voyait qu’éphémère, elle choisit d’avorter. L’avenir ne semble pas possible. De fait, l’histoire d’Antonia se termine dans un accident de voiture, scène d’ouverture du film.
« À son image » est un beau film, baigné de lumière à l’image de la Corse elle-même. Il parlerait de bonheur si les hommes et les événements ne se conjuguaient pour tout gâcher. C’est la mélancolie qui s’impose, portée par les musiques choisies par Frédéric Junqua.