La Mort de Danton

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Le National Theatre de Londres donne actuellement Danton’s Death, La Mort de Danton, une pièce de Georg Büchner mise en scène par Michael Grandage.

Georg Büchner né deux ans avant Waterloo et mort à l’âge de 23 ans en 1837, fut fasciné par la révolution française et sa réviviscence dans les rues de Paris en 1830. Considéré comme subversif, il s’exila à Strasbourg. Il y mena de brillantes études de médecine et en parallèle écrivit un roman et des pièces de théâtre, dont Woyceck et La Mort de Danton. Cette dernière est produite par le National Theatre dans une version allégée de Howard Brenton.

La pièce se déroule entre le 25 mars et le 5 avril 1794. Un an plus tôt, le Comité de Salut Public avait été institué. La terreur battait son plein avec les massacres de septembre dans les prisons parisiennes, l’exécution à la guillotine des 21 députés girondins en octobre, le massacre de 6000 prisonniers vendéens en décembre, la liquidation de la fraction hébertiste en mars.

La pièce est construite sur l’antagonisme entre Danton (Toby Stephens) et Robespierre (Elliot Levey). Celui-ci est présenté comme un homme intraverti et solitaire, réprimant son anxiété profonde par un fondamentalisme : la vertu et la révolution vont générer le monde, il faut aller de l’avant. Il trouve en Saint-Just (Alec Newman) son tribun : pourquoi avoir peur du sang ? Comme la lave d’un volcan, la révolution avance inexorablement et il est naturel qu’elle prenne des vies.

Danton est un homme complexe. Il aime les plaisirs et les femmes. Il est certes un acteur convaincu de la Révolution, mais il est conscient des erreurs commises, comme celle d’avoir créé le tribunal révolutionnaire et mis en route une mécanique infernale. Mais comment arrêter une machine infernale qu’on a soi-même mise en route ? La machine s’arrêtera enfin, trois mois après qu’il fût guillotiné, lorsque le dernier acteur majeur du drame, Robespierre, y succomba lui-même.

Photo : The Guardian.

L’Affaire Venables divise les Britanniques

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Le cas d’un criminel récidiviste, Jon Venables, divise l’opinion publique britannique. Le cas n’est pas banal : le criminel en question avait 10 ans lorsqu’avec un complice de son âge il assassina un petit garçon après lui avoir fait subir des sévices.

Jon Venables vient d’être condamné à au moins 2 ans d’emprisonnement pour avoir recélé et diffusé du matériel pornographique enfantin. Il peut rester indéfiniment en prison si le juge d’application des peines en décide ainsi, une particularité du droit pénal britannique qui fait l’envie de la droite française.

En 1993, âgé de 10 ans, il avait un complice assassiné un petit garçon, James Bugler, après l’avoir torturé. Il avait été libéré en 2002. On lui avait donné une nouvelle identité. Il vient d’être condamné pour l’usage et la diffusion de pornographie enfantine.

Pour les « tabloïds » britanniques, la cause est entendue : Venables est un monstre (freak, monster), un dépravé, une bête. Aucun espoir de rédemption n’est possible dans son cas. Il est depuis son crime et pour toujours du côté de l’enfer. Le « politiquement correct » empêche les tabloïds de réclamer la peine de mort, mais la meute lâchée dans Facebook s’en charge.

Il y a là une question de société fondamentale : y a-t-il d’un côté les braves gens et de l’autre des voyous irrécupérables ? Ou bien faut-il reconnaître le versant sombre des gens biens et la capacité des délinquants à se repentir ?

Son avocat fit une déclaration dont voici des extraits. «  (…) Jon Venables commença une vie indépendante en mars 2002, à l’âge de 19 ans, après avoir passé la moitié de sa vie en prison. La décision de le libérer était fondée sur la compréhension de ce qu’il avait fait, sur l’acceptation de sa responsabilité et de ce que cette responsabilité l’accompagnerait pour le reste de sa vie. Il avait dit que chaque jour qui s’était écoulé depuis 1993, il avait pensé à combien la vie aurait été différente pour tous ceux qui avaient été affectés, et il comprend qu’ils aient aussi leurs propres motifs de réflexion.

Sa libération impliquait un défi, un défi qui a pesé sur lui chaque jour depuis lors. Selon les mots des attendus de la sentence, il avait une « vie léguée » – un changement complet d’identité – il fut formé par la police à la contre-surveillance et il lui a fallu vivre en permanence dans le mensonge pour le reste de la vie. Il y avait peu de doute que si son identité était révélée, sa vie aurait été en danger. (…) L’une des majeures conséquences sur sa vie fut l’incapacité à partager un énorme secret… il craignait d’être toujours seul.

Il s’excuse auprès des amis qu’il s’est faits au cours de ces huit années, qui au mieux vont être perplexes et troublés, et plus probablement blessés et en colère en réalisant que leur ami n’était pas ce qu’il disait qu’il était.

(…) Ce n’est nullement une excuse, mais Jon Venables dit maintenant qu’à la réflexion, ne connaissant pas tout à fait à quoi ressemblait le monde dans lequel on le libérait et comment il fonctionnait, il n’a peut-être pas totalement compris à quel point le passage du temps en lui-même n’atténuerait pas par lui-même ses frustrations et son malheur. Il dit qu’il comprend qu’il n’y avait pas de modèle à sa disposition ou  à celle de ceux qui le soutenaient – il se sentait comme un canari au fond d’une mine. Le retour en prison représenta une sorte de soulagement lorsqu’il se produisit. Il a l’intention d’apprendre des leçons qui l’aident à affronter ce défi de nouveau.

(…) Il est décidé, maintenant et une fois pour toutes, à devenir la personne qu’il désire être de manière qu’une fois sorti de prison il n’y revienne plus jamais. »

Illustration de The Guardian : couvertures de tabloïds sur l’affaire Venables.

Du Greco à Dali

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Amateurs parisiens de la peinture espagnole, dépêchez-vous : le dernier jour de l’exposition « du Greco à Dali » au musée Jacquemart – André est dimanche premier août !

La référence au Greco de cette exposition extraite de la collection Pérez Simón est un peu abusive : il n’y a de lui qu’une toile de format miniature. En revanche, on y trouve de nombreux chefs d’œuvre de Dali, aux côtés de Ribera, Murillo ou Picasso.

Je retrouve avec plaisir l’œuvre de Joaquín Sorolla, dont nous aimions visiter la maison musée à Madrid. Le traitement de la lumière est exceptionnel.

Un chef d’œuvre de l’exposition est le portrait de femme andalouse peint par Julio Romero de Torres vers 1925 – 1930.

Illustration : Soleil du Matin, par Joaquín Sorolla y Bastida (1901).

Site Internet de l’exposition : www.cultrurespaces-minisite.com/greco-dali.

Site Internet du musée Sorolla à Madrid : http://www.museosorolla.mcu.es/.

Beauté des femmes âgées

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Le National Theatre de Londres présente une exposition photographique intitulée « Infinite Variety » consacrée à des portraits de femmes âgées. Dans The Guardian, la journaliste Sarah Churchwell remarque que l’usage de femmes âgées comme modèle est très bien, si ce n’est qu’elles n’ont pas l’air du tout de femmes âgées.

L’exposition au National Theatre cite Harriet Beecher Stowe : « tant a été dit et chanté sur les belles jeunes filles. Pourquoi nul ne s’éveille-t-il à la beauté des vieilles femmes ? » « Dans ces jours d’obsession avec la jeunesse, où seule la jeune beauté semble appréciée, les signes de l’empiètement de l’âge sont détestés comme des rappels d’un processus de délabrement final. Mais les femmes âgées ne peuvent pas être aussi belles que les jeunes, alors pourquoi essayer ?

Pourquoi ne pas célébrer les gains en profondeur, en personnalité et en individualité que l’on sacrifie au lustre superficiel de la jeunesse ? Pourquoi ne pas apprendre à aimer les lignes de couleur grise et argentée, délicatement dessinées à l’eau forte ? Organisée par l’actrice Harriet Walter, cette exposition célèbre la beauté du visage de la femme vieillissante. »

Dans un article de The Guardian publié le 24 juillet, Sarah Churchwell écrit qu’il semble que les femmes plus âgées sont enfin célébrées dans notre société, ou du moins c’est ce qu’on nous dit. Elle cite Jane Fonda (72 ans), Sharon Stone (52 ans), Madonna (51 ans) ou Elle MacPherson (47 ans) qui ont signé des contrats avec des marques de mode ou de cosmétiques.

 « Mais avant de déboucher le champagne, admettons quelque chose d’évident. Le fait est que toutes ces femmes semblent au moins 20 ou 30 ans plus jeunes que leur âge, particulièrement en photo. Dans sa campagne pour Dior, Sharon Stone semble magnifique, bien sûr, – mais elle ressemble aussi plutôt à un dessin animé japonais d’elle-même il y a 30 ans. Les « photographies » sont si retouchées qu’elles tiennent plus de la peinture : il n’y a pas une ride, pas un soupçon de pli de la bouche et certainement pas un cheveu gris. Sean Connery n’avait pas seulement les cheveux gris, mais il était chauve quant il séduisait Catherine Zeta-Jones dans Haute Voltige il y a dix ans : et on le considérait encore comme sexy.

Si Sharon Stone avait des cheveux gris (ou rares !) et faisait la promotion de Dior, cela pourrait ressembler à une évolution de nos attitudes à l’égard des femmes plus âgées – si non une révolution. Mais j’accepterais une ride, un pli, un simple signe d’une vie vraiment vécue, comme preuve que nous trouvons maintenant les femmes plus âgées attractives. La plupart du temps, nous ne le faisons pas : nous demandons simplement qu’elles ressemblent à des femmes plus jeunes. »

Photo de l’exposition Infinite Variety par Jill Kennington. Référence de l’article de Sarah Churchwell : http://www.guardian.co.uk/lifeandstyle/2010/jul/24/madonna-and-other-mothers-id-like-to