Les lignes tordues de Dieu

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Dans son roman « Los renglones torcidos de Dios (Booket, 1979),  Torcuato Luca de Tena nous emmène aux frontières de la santé mentale et de la folie.

Les « lignes tordues de Dieu » sont les malades mentaux qui peuplent les asiles psychiatriques, paranoïaques, schizophrènes, phobiques, débiles profonds. Directeur du journal conservateur ABC, romancier, Torcuato Luca de Tena (1923 – 1999) s’est pris de passion pour ce dérèglement de l’harmonie de la Création, pour l’enfermement thérapeutique, pour le travail passionnant mais souvent ingrat des médecins et infirmiers qui tentent de redresser les lignes. Pour écrire ce roman, il se fit hospitaliser dix-huit jours dans un hôpital, sous un faux nom et avec un faux diagnostic. Le roman se déroule dans une ancienne Chartreuse de la région de Zamora transformée en Hôpital Psychiatrique, Notre Dame de la Fuentecilla, qui soigne 800 patients.

Le personnage central du roman, Alice Gould, est une jeune femme d’une quarantaine d’années, d’allure bourgeoise, cultivée, intelligente, ceinture bleue de judo. Elle se dit détective. Elle prétend avoir manipulé son enfermement administratif et simulé une paranoïa pour identifier le coupable d’un meurtre parmi les internés.

Alice s’affronte au Directeur de l’hôpital, Samuel Alvar. Partisan de l’anti-psychiatrie, d’origine modeste, il est convaincu de la véracité et de la dangerosité de la paranoïa d’Alice. Il hait cette femme hautaine qui critique ses méthodes, s’est gagné la confiance du corps médical et fomente la révolte dans l’institution. De son côté, Alice s’estime trahie par Alvar, qui aurait favorisé son entrée pour qu’elle puisse mener l’enquête. Alvar châtie Alice en l’internant dans la « cage aux lions » avec les débiles profonds et les malades dangereux, provoquant ainsi un rejet unanime contre lui.

Alice se prend d’amitié pour un Iñaqui Urqueita, un Basque entré volontairement pour guérir d’une phobie de l’eau. C’est un homme fin et intelligent, qui introduit son amie dans son nouveau monde.  Il guérira le jour où, poussé dans la piscine par des co-internés, lui reviendra en mémoire la mort d’un  camarade de classe mort dans une piscine lorsqu’il avait cinq ans. En revanche, il n’obtiendra pas d’Alice ce qu’il désirait plus que tout : l’épouser.

A la Fuentecilla se trouve un ange, une jeune catalane nommée Monserrat Castell. Psychologue, assistante sociale, monitrice de gymnastique, Montserrat se dévoue inlassablement au service des malades qu’Alice surnomme « la Cariatide de soi-même », le « Caballero Pleureur », la « Fille Oscillante », « l’Homme Eléphant », « le Gnome », « le Jardinier », « l’Auteur de la Théorie des Neuf Univers », « la Grande Duchesse de Pitimini », « la petite Chatte Lesbienne », « la Femme Cyclope », et les autres. Elle protège Alice et lui évite les tourments des traitements à l’insuline ou à l’électrochoc auxquels le Directeur voudrait la soumettre. Montserrat a décidé de se faire Carmélite. Alice se fait peu à peu à l’idée folle de faire sa vie dans l’hôpital, et de substituer Montserrat dans son rôle de « maman » des malades, jouissant ainsi qu’une maternité qu’elle n’a pu atteindre par le mariage.

Alice vit une relation forte avec César Arellano, le Chef des Services Cliniques de l’hôpital. Convaincu de la santé d’Alice et de l’injustice de son enfermement, César finira par changer d’opinion, mais la déclarera cependant saine d’esprit. Entre la détective désormais attachée à l’hôpital par un lien puissant et le médecin veuf qui a construit ici sa vie, une histoire partagée va peut-être commencer.

Illustration : œuvre de Salvador Dali 1944

The Ghost Writer

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Le dernier film de Roman Polanski, The Ghost Writer, est un excellent thriller qui fait écho à l’actualité de la Grande Bretagne.

La première scène de « The Ghost Writer » donne froid dans le dos. Un ferry arrive au port, de nuit sous une pluie épaisse. L’équipage s’active à faire débarquer les véhicules, mais un 4×4 BMW reste sur le pont sans passager. On découvrira plus tard son conducteur noyé rejeté par la mer sur une plage de l’île. On saura que cette île est située au large de Boston et qu’elle sert de refuge à Adam Lang, ancien premier ministre de Grande Bretagne.

Adam Lang est l’objet de manifestations incessantes d’opposants à la guerre d’Irak. Il est maintenant menacé de poursuites par le Tribunal Pénal International pour avoir autorisé des vols emmenant des hommes suspects de terroristes vers des centres de torture. Il vit reclus avec sa femme Ruth et son entourage dans une maison de béton et de verre ouvrant sur les dunes et sur l’océan. L’homme noyé est le « ghost writer », le « nègre » qui devait l’aider à rédiger ses mémoires.

Un autre nègre est embauché à prix d’or pour achever le travail commencé. Mais l’homme, joué par Erwan Mc Gregor, se rend compte de ce que son prédécesseur avait découvert une insupportable vérité : les liens de l’ancien premier ministre avec un agent de la CIA. Son pro-américanisme ne serait pas imputable à ses convictions, mais à une trahison. Peu à peu, le « ghost writer » se coule, épouvanté mais consentant, dans le destin qui avait conduit son prédécesseur à la mort.

L’atmosphère du film est oppressante du début à la fin, à cause de la captivité de Lang dans une île elle-même isolée et d’un climat hostile, froid et pluvieux. Les acteurs, en particulier Pierce Brosnan (Adam Lang) et Olivia Williams (Ruth Lang) sont magnifiques.

Photo du film « The Ghost Writer »

Fièvre du football

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La fièvre du football s’est emparée de l’Angleterre comme de nombreuses autres nations.

Bien que la Coupe du Monde de football ait commencé de manière décevante pour l’Angleterre (1-1 contre les Etats-Unis), les supporters anglais croient que leur équipe peut aller en finale et l’emporter. Ils ont les joueurs d’exception, tels Romney, Gerrard ou Lampard. Ils ont un sélectionneur aux nerfs d’acier, Fabio Capello, recruté en Italie pour faire fonctionner ensemble ces individualités brillantes. Ils ont même eu leur commedia dell’arte, avec la destitution comme capitaine de John Terry, coupable d’avoir eu une « affaire » avec l’ancienne fiancée d’un coéquipier.

Dans les rues, les bars montent des écrans improvisés pour la vidéoprojection. Dans beaucoup d’entreprises, la projection des principaux matchs est prévue dans les locaux et horaires de travail.  Dans les rues, de nombreuses voitures arborent le drapeau de l’Angleterre.

Photo « transhumances » : « mini » aux couleurs de l’Angleterre à Hampstead

Les gènes de l’autisme

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Des scientifiques sont sur la voie d’établir les déclencheurs génétiques de l’autisme, permettant ainsi un diagnostic précoce de cette condition. C’est ce que disent les journalistes du quotidien britannique The Guardian Alok Jha et Sarah Boseley dans un article paru le 10 juin.

Dans un article paru dans la revue Nature, des scientifiques partie prenante du « Autism Genome Project » indiquent qu’en comparant des caractéristiques génétiques de populations d’autistes et de personnes non affectées, ils ont identifié des variations génétiques plus fréquentes dans le premier groupe. Ces « copy number variations » peuvent consister dans des bouts d’ADN manquants ou au contraire des copies supplémentaires de séquences dans les gènes et autour.

Cette découverte donne l’espoir d’une détection précoce du risque d’autisme chez les jeunes enfants. « Actuellement le diagnostic de l’autisme est entièrement comportemental et dure longtemps. Les parents sont soumis à un long processus dans lequel leur enfant est évalué, dit Louis Gallagher du Trinity College de Dublin. Certains enfants ne reçoivent pas de diagnostic avant l’âge de cinq ans. Grâce à une détection précoce, ces enfants pourraient bénéficier d’une intervention plus tôt, susceptible de limiter la gravité de leur condition ».

La National Autistic Society l’appelle  « un handicap de développement qui dure pour la vie et affecte la manière dont une personne communique et est en relation avec les gens qui l’entourent ». C’est un spectre de dysfonctionnements, et non un seul, qui implique une « triade de désajustements » : difficultés avec la communication sociale, l’interaction sociale et l’imagination sociale. Les personnes autistes ne peuvent « lire » les autres personnes à la manière dont la plupart des adultes arrivent à le faire. Elles ne comprennent pas le langage corporel ou les expressions faciales et peuvent prendre les plaisanteries au pied de la lettre. Quelques unes peuvent ne pas parler mais communiquer par des gestes. Elles peuvent se tenir trop près ou dire des choses qui semblent impolies ou déplacées. Elles peuvent ne pas être capables de se placer dans les bottes d’une autre personne ou de prédire ce que leur compagnon est sur le point de dire ou faire.

Référence de l’article du Guardian : http://www.guardian.co.uk/science/2010/jun/09/genetics-autism-story-tracker. Photo du film Rain Man, avec Dustin Hoffman et Tom Cruise (1988)