Du Greco à Dali

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Amateurs parisiens de la peinture espagnole, dépêchez-vous : le dernier jour de l’exposition « du Greco à Dali » au musée Jacquemart – André est dimanche premier août !

La référence au Greco de cette exposition extraite de la collection Pérez Simón est un peu abusive : il n’y a de lui qu’une toile de format miniature. En revanche, on y trouve de nombreux chefs d’œuvre de Dali, aux côtés de Ribera, Murillo ou Picasso.

Je retrouve avec plaisir l’œuvre de Joaquín Sorolla, dont nous aimions visiter la maison musée à Madrid. Le traitement de la lumière est exceptionnel.

Un chef d’œuvre de l’exposition est le portrait de femme andalouse peint par Julio Romero de Torres vers 1925 – 1930.

Illustration : Soleil du Matin, par Joaquín Sorolla y Bastida (1901).

Site Internet de l’exposition : www.cultrurespaces-minisite.com/greco-dali.

Site Internet du musée Sorolla à Madrid : http://www.museosorolla.mcu.es/.

Cartes magnifiques

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 La bibliothèque Nationale (British Library) de Londres présente jusqu’au 19 septembre une exposition intitulée « magnificent maps ».

« Les cartes traitent rarement seulement de géographie. De belles cartes de valeur ont ornée les murs depuis l’époque romaine et même plus tôt, manifestant ainsi le pouvoir, le goût et l’influence de leurs propriétaires », dit le catalogue de l’exposition.

L’exposition n’est pas organisée chronologiquement, mais regroupe des cartes d’époques différentes selon le lieu où elles étaient affichées : la galerie d’un château, la salle d’audience, la chambre à coucher royale, le cabinet des curiosités, la rue, la maison du marchand, le bureau du Secrétaire d’Etat, la salle de classe.

Illustration : carte de Londres vue par l’artiste Stephen Walter, www.stephenwalter.co.uk.

Duane Hanson, le rêve américain

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Le Parc de la Villette à Paris présente une exposition consacrée au sculpteur américain Duane Hanson. Ses sculptures hyperréalistes mettent en scène des américains moyens, accablés par une vie qui ne correspond pas au rêve américain.

Duane Hanson (1925 – 1996) a principalement sculpté des personnes humaines en taille réelle, d’après des moulages qui permettaient à l’artiste de reproduire fidèlement jusqu’aux rides du visage. Mais son ambition, au contraire du Musée Grévin, n’était pas la ressemblance avec ses modèles. Il les choisissait délibérément quelconques. Son ambition était de saisir la personne humaine perdue et comme pétrifiée par son destin. Les personnages, des ouvriers, une femme de ménage, une meneuse de parade semblent épuisés, à bout de ressource. Figés comme au bord de la mort, ils expriment aussi le courage qu’il faut pour rester debout malgré tout.

Le catalogue de l’exposition, publié par Actes Sud, contient des textes magnifiques du philosophe et écrivain français Bruce Bégout. Voici un extrait du commentaire de Man with Walkman, œuvre réalisée par Duane Hanson en 1989.

« Un flot de graisse qui enfle, déborde de touts parts et enserre le corps rendu gourd et maladroit. L’obésité (…) est symbole d’une obésité sociale, spirituelle, charnelle qui s’affiche partout sans vergogne. (…) (Le corps) stocke trop de calories en prévision en prévision d’activités grandioses qui ne verront jamais le jour – c’est là l’aspect comique de l’obésité : le gaspillage d’une énergie sans usage (…) Comme si l’individu, prévoyant de futures pénuries se constituait des réserves à même la chair. Au cas où. (…) On comprend pourquoi, dès lors, les personnages de Hanson se figent sur place et donnent l’impression de ne plus pouvoir bouger. Le trop-plein d’énergie qu’ils ont emmagasinée les empêche de se mouvoir. Leur obésité, synonyme de pouvoir, d’abondance, de richesse, se convertit en fixité. Et à la fin, leur corps balourd cloué sur place perd tout lien avec le monde, les enfermant dans leur prison de graisse. »

Illustration : Man on mower, Duane Hanson 1995.

Magie d’un monde souterrain

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Ce texte a été écrit en 2002 à Madrid. Il a inspiré ma première encontre avec Corinne Dauger, dont « transhumances » a rendu compte de la récente exposition à Paris, « Oscillations ».

La correspondance entre les lignes 4 et 5 du métro de Madrid à la Station Diego de León a triste réputation. On emprunte un escalier à angle droit, on parcourt un interminable couloir lugubre. On tente ensuite de descendre sur le quai, lorsqu’on n’en est pas empêché par le flot contraire des voyageurs qu’une rame vient soudain de libérer.

La correspondance de Diego de León est blanche de céramique, sent le désinfectant, dilate  le temps, éprouve les nerfs. Elle se présente ainsi du moins pour qui ne sait la regarder, prendre son pouls, se mouvoir à son rythme.

Car ce monde souterrain est plein de couleurs. Hommes et femmes, blancs, indiens et noirs, s’y croisent vêtus de costumes de ville, de bermudas, de minijupes et de jeans. Une jeune beauté en pantalon moulant laisse admirer son ventre bronzé et se protège de l’improbable soleil par des lunettes de star. Une autre élégante en sari noir et blanc couvre ses cheveux d’un discret fichu. Des affiches polychromes annoncent la sortie d’un film et vantent des articles de mode.

Ce monde bruit des claquements aléatoires de pas sur le sol, de chuchotements échangés et d’éclats de rire partagés. Guitaristes, accordéonistes, flûtistes se disputent cet auditorium improvisé, et leur absence donne au silence une dimension irréelle.

Ce monde est en mouvement. En de rares et éternels moments, des passantes magnifiques habitent l’espace comme la passerelle d’un défilé de mode. Elles avancent d’un pas ondoyant et sûr, conscientes de leur séduction et insouciantes du regard d’autrui.

A la correspondance de Diego de León, le plomb se change en or, le silence en mélodie et le déplacement de masse s’ouvre sur un instant de grâce.

Illustration : Corinne Dauger, « Let them go », www.corinnedauger.com