Manchester

100610_palace_hotel_manchester.1276202684.jpg

La Conférence Risque Pays organisée le 9 juin par Coface à l’Hôtel Palace de Manchester m’a fait aimer cette ville.

Je ne suis resté qu’une journée à Manchester, j’ai flâné dans son centre ville pendant une heure et j’ai parlé avec des gens qui y vivent heureux.

Bien que son nom vienne du latin Mamucium (place forte), Manchester telle que nous la connaissons est née lors de la révolution industrielle. Son hôtel de ville, construit en brique dans un style néogothique date de la fin du dix-neuvième siècle. Seule la Cathédrale est relativement ancienne : elle remonte au quinzième siècle, mais elle ne devint siège du diocèse qu’en 1847, elle fut largement détruite par des bombardements pendant la seconde guerre mondiale et ses œuvres d’art les plus remarquables sont les lumineux vitraux réalisés par Anthony Holloway et Margaret Taherne ces quarante dernières années.

L’Hôtel Palace est l’ancien siège de la compagnie d’assurance Refuge transformé en structure hôtelière à partir de 1893. Le rez-de-chaussée a conservé son caractère victorien et édouardien, avec d’immenses salles à colonnades massives. Les chambres au contraire, que l’on trouve à grand peine dans une enfilade de couloirs et d’escaliers, ont été agencées selon un design résolument moderne. Telle est la ville. Elle tente de faire de sa courte histoire un vrai patrimoine ; elle cherche à se projeter dans le futur. Près de la Cathédrale on trouve des pubs traditionnels, mais aussi une grande roue dans le style du London Eye et des galeries marchandes du dernier cri.

Manchester, ville industrielle puis financière, s’est dotée d’une des meilleures universités européennes. Elle est pionnière dans le domaine des biotechnologies et de la communication.

J’aime les villes qui, comme Pittsburg ou Bilbao, savent se réinventer et faire naître de la beauté dans un cadre autrefois glauque. Manchester est de celles-là.

Photo : hall de l’hôtel Palace.

Ile de Wight

100606_wight1.1275947601.JPG

Un week-end à l’Ile de Wight, à une vingtaine de kilomètres au sud de Portsmouth, offre un vrai dépaysement.

Le dépaysement tient d’abord à la traversée en ferry, qui emmène d’un monde à l’autre. Dans notre cas, il se mérite. Nous découvrons à Portsmouth qu’il ne reste plus à bord de place pour des voyageurs sans réservation. D’un parking de supermarché nous réussissons à réserver in extremis sur Red Funnel, une ligne qui embarque à Southampton.

Les falaises de calcaire blanc de la Baie d’Alum, au Nord Ouest de l’île, offrent un spectacle d’une austère beauté. La craie blanche contraste avec le vert intense de la prairie et le ciel parcouru de nuages. Nous parcourons plusieurs kilomètres à flanc de falaise sur un sentier marqué dans l’herbe fraîche par le passage répété des randonneurs. Nous avions vécu au Cap Blanc Nez (Pas de Calais) et à Beachy Head (entre Brighton et Eastbourne) un semblable sentiment de profonde respiration.

Notre hôtel à Ventnor nous déçoit. Il est mal entretenu et pour tout dire mal tenu. Pour nous consoler, le petit déjeuner « full English », servi dans une salle à manger de style anglais tapissée de rouge, est excellent.

Nous empruntons le sentier côtier jusqu’à l’ancien sanatorium installé là au dix-neuvième siècle pour profiter du climat réputé à la fois clément et revigorant de l’île. Il a été transformé en jardin botanique doté d’un centre d’accueil touristique ultramoderne. Le visiter en cette saison de floraison offre un festival de couleurs, de formes et d’aromes.

Nous déjeunons d’une salade de crabes arrosée d’un vin blanc californien et d’une bière rousse anglaise à la terrasse d’un café en bord de mer.

Dans l’intérieur des terres, le paysage est composé de collines verdoyantes. Nous visitons le joli village de Godshill. Beaucoup de ses maisons anciennes aux toits de chaume sont occupées par des artistes. L’église, perchée sur un promontoire, date du quinzième siècle.

L’île de Wight compte une importante population permanente et saisonnière de retraités. Elle a été atteinte par le « tsunami gris » évoqué par Martin Amis. Mais les vieux que l’on croise ici ne se conforment pas à l’image de déchéance dénoncée par l’écrivain. Ils sont dignes, désireux d’engager la conversation et décidés à braver leurs rhumatismes pour aller où bon leur semble. L’île est parcourue en tous sens par des autobus verts à deux étages qui passent à cadence rapprochée. Ils ont dans les personnes âgées une clientèle captive : il n’est pas rare de voir une dizaine de séniors patientant à un arrêt au milieu de nulle part.

La présence massive de personnes âgées imprime son rythme à la vie insulaire. Bien que située à moins d’une heure de bateau du reste de l’Angleterre, on vit ici plus lentement. Les boutiques, les restaurants et les hôtels ont souvent un charme désuet, avec un mobilier et une décoration datant des années cinquante et soixante, les années de gloire de leurs clients. Un hôtel de Ventnor se vante même, sur un panneau publicitaire, d’offrir à ses clients la télévision en couleur !

Photo « transhumances » : Sentier Tennyson sur la falaise de Alum Bay.

After the Dance

100606_after-the-dance.1275942645.jpg

Le National Theatre de Londres donne actuellement « After the Dance », une pièce écrite par Terence Rattigan en 1939 et mise en scène par Thea Sharrock.

 On fêtera l’an prochain le centenaire du dramaturge britannique Terence Rattigan (1911 – 1977). « After the dance » est empreinte de l’angoisse d’avant-guerre. Les trois actes se déroulent dans le salon de David Scott Fowler, un gentleman d’environ 35 ans qui tue le temps en buvant, en donnant des fêtes et en faisant mine d’écrire un livre historique. Sa femme Joan (magnifiquement jouée par Nancy Carroll) est au diapason. Elégante, brillante, elle en rajoute dans le registre de la futilité : la vie est un jeu, il ne faut rien prendre au sérieux, surtout pas l’amour.

David entretient son cousin Peter, censé dactylographier son livre sous la dictée. Il entretient aussi un ami, John Reid, qui professe une horreur rédhibitoire pour le travail sous toutes ses formes. Mais John s’avère un observateur pénétrant de ce qui se passe autour de lui. C’est ainsi qu’il se rend compte de l’attraction mutuelle de David et Helen, la jeune fiancée de Peter. Helen jure de réformer David, de lui faire abandonner la boisson et de le mettre au travail.

Joan fait la brave devant le naufrage de son couple, elle prétend désirer une vie de riche divorcée sur la Côte d’Azur, pousse même Helen à aller de l’avant. Mais derrière le masque, le rictus : Joan se laisse tomber d’un balcon, ivre, au cours d’une soirée dansante.

Quelques mois plus tard, David se retrouve seul. Il n’a pas fait le deuil de Joan et son ami John le quitte, lui et l’oisiveté, pour occuper à Manchester un emploi sous-payé. Il s’accroche désespérément à Helen, bien qu’elle s’applique de plus en plus à le remodeler, contre sa nature, en mari sobre et travailleur. John conseille à David de renoncer à Helen : il s’enfonce avec elle dans le mensonge du sérieux, come il avait auparavant entraîné Joan dans le mensonge de la frivolité. Il risque de tuer Helen comme il a tué Joan.

Rattigan dépeint une génération qui avait cru pouvoir se distraire de la première guerre mondiale mais dut affronter l’effroyable vérité de la seconde.

Illustration : affiche de « After the Dance »

Réception à Westminster

100527_ouverture_parlement.1274977910.jpg

Etre invité dans les salons du Parlement britannique quelques semaines après l’élection constitue une expérience intéressante.

Il est fréquent que des entreprises ou des associations, parrainées par des Membres du Parlement ou des Lords, organisent des cocktails dans les salons de la House of Parliament et leurs balcons surplombant la Tamise. Je participe régulièrement à la réception de printemps de l’association des exportateurs britanniques, Bexa.  Nous sponsorisons cet événement et y invitons des clients.

Voyant que je suis arrivé à  l’avance, un policier en faction m’invite à me rendre la galerie des visiteurs de la Chambre des Communes. Les mesures de sécurité sont sévères et une vitre nous sépare des quelques députés qui, dans la salle des séances, débattent de l’engagement britannique en Afghanistan. La disposition de la salle des séances est clairement antagonique : Majorité et Opposition se font face au lieu d’être disposées en hémicycle. Une vaste table les sépare, sur laquelle est disposé un sceptre. Deux personnages en perruque siègent à l’extrémité de la table ; derrière eux, le Speaker, ou président du Parlement. Aujourd’hui, l’ambiance est polie : le nouveau secrétaire d’Etat à la Défense rend hommage au travail de son prédécesseur, assis en face de lui. D’ici peu de temps, d’autres débats donneront lieu à des vociférations soigneusement codifiées.

Bexa avait invité à son cocktail le ministre du commerce extérieur du « shadow cabinet » conservateur, Geoffrey Clifton-Brown. Malheureusement pour ce dernier, le poste est finalement revenu à un libéral démocrate, Ed Davey. Faisant contre mauvaise fortune bon cœur, Geoffrey vante les mérites de la coalition et présente chaleureusement son heureux rival. Au fair-play britannique s’ajoute l’humour décapant du président de Bexa, Sir Richard Needham. Les exportateurs présents au cocktail sont plutôt optimistes : si nous avons résisté à la crise de 2008 et 2009, la gueule de bois européenne ne nous fait pas peur.

(Photo The Guardian : ouverture de la session du Parlement par la Reine).