Etonnantes élections britanniques

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Les élections du 6 mai en Grande Bretagne ont été pleines de surprises, pour les Britanniques et plus encore pour les observateurs de l’étranger.

La surprise majeure est l’absence de traduction de la « Cleggmania » sur le résultat des élections. Non seulement le Parti Libéral Démocrate ne progresse pas, mais il perd 5 sièges !

Un observateur français est dérouté par la manière dont les Britanniques vivent l’élection. Le fait qu’elle se déroule un jeudi est presque anecdotique. Ce qui surprend, c’est la polarisation exclusive sur le nombre de sièges. En France, on se focalise d’abord sur le taux de participation. Ici, on n’apprendra qu’incidemment qu’il a été de 65% au lieu de 61% en 2005. La forte participation a été soulignée par les journaux, mais surtout parce qu’ici et là des électeurs de la dernière heure se sont vu interdire l’accès aux bureaux de vote après des heures de queue.

En France, on accorde une grande importance au pourcentage des votes pour chaque parti : 36% pour les Conservateurs, 29% pour les Travaillistes, 23% pour les Libéraux Démocrates. De l’autre côté de la Manche, ce qui compte est le nombre de sièges, respectivement 306 (+97) pour les Conservateurs, 258 (-91) pour les Travaillistes, 57 (-5) pour les Libéraux Démocrates. Un observateur français remarquera que 2 millions d’électeurs de plus ont voté pour les Conservateurs que pour les Travaillistes, et 1.4 millions de plus pour les Travaillistes que pour les Libéraux Démocrates. Il s’indignera de ce qu’il y faille 120.000 électeurs pour élire un député Libéral Démocrate, 35.000 pour un député Conservateur et 33.000 pour un député Travailliste.

 La démocratie est solide des deux côtés de la Manche. Mais elle est vécue de manière bien différente.

Photo The Guardian : les médias à Westminster.

Women Beware Women

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Le National Theatre de Londres donne actuellement Women Beware Women (femmes méfiez-vous des femmes), une pièce de Thomas Middleton, un contemporain de Shakespeare. L’adaptation par la metteuse en scène Marianne Elliott est particulièrement réussie.

Middelton a écrit cette pièce probablement en 1621. L’action se passe à la Cour du Duc Côme de Médicis à Florence. Livia, une dame de la cour, intrigue pour offrir la jeune Bianca, à peine mariée au jeune Leantio, à l’appétit du Duc. Elle invente une filiation imaginaire à sa nièce Isabella pour ouvrir la voie à une relation, incestueuse, avec son oncle Hippolito. Le Duc convainc Hippolito d’assassiner Leantio pour pouvoir épouser Bianca. Mais les vengeances se déchainent pendant les noces qui d’achèvent en bain de sang.

Nul n’est moral à la Cour des Médicis. Même Leantio considère sa jeune femme Bianca comme un trophée qu’il faut enfermer à clés de peur que d’autres le convoitent. Même Bianca, qui a épousé Leantio par passion au prix d’une mésalliance, se laisse bien vite séduire par la perspective de devenir duchesse, riche et puissante. Livia, jouée par l’extraordinaire Harriet Walter, est elle-même un serpent parmi les serpents, dotée d’une formidable énergie mais finalement vulnérable.

Comment mettre à la scène une tragédie écrite il y a près de 400 ans ? Marianne Eliott donne dans le grandiose. Un plateau tournant présente le Palais des Médicis avec deux faces, l’une convexe pour les scènes d’extérieur, l’autre concave pour l’intérieur du Palais. Les éclairages donnent encore plus de profondeur au décor. C’est particulièrement sensible quand le Duc marche seul en grand uniforme sous une pluie d’argent et a le regard attiré par Bianca qui le regarde d’une fenêtre ; ou pendant la partie d’échecs que Livia propose à la mère de Leantio pendant qu’à l’étage le duc viole Bianca.

Comme à l’époque de Middelton, la musique et la danse ont leur place dans la pièce. Un orchestre surplombe le plateau. La scène finale, le bal masqué donné pour les noces fatales de Côme et de Bianca, est très précisément chorégraphié. Mais musique et chorégraphie ne sont pas du dix-septième siècle, de même que les costumes ou la diction des personnages. Pour autant, ils ne sont pas exactement d’aujourd’hui : l’ambiance musicale jazzy ainsi que l’esthétique à la Marilyn Monroe de la coiffure et des vêtements de Bianca évoquent les années cinquante en Amérique. En poursuivant cette veine, on pense à Grace Kelly et à la Principauté de Monaco.

Photo The Observer, Harriet Walter dans le rôle de Livia.

Egales opportunités

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L’un des modules de formation à distance obligatoires pour les salariés de mon entreprise au Royaume Uni a pour nom « égales opportunités et diversité ».  Son contenu serait vraisemblablement très différent de l’autre côté de la Manche.

Comme nombre d’entreprises du secteur financier en Grande Bretagne, celle où je travaille impose à son personnel de suivre des programmes de formation par Internet sur des sujets de « compliance », c’est-à-dire de respect de la législation. Ces programmes couvrent une variété de sujet tels que les mesures contre le blanchiment d’argent ou le respect du consommateur. Un module traite des égales opportunités et de la diversité.

Le module explique pourquoi l’entreprise et chacun de ses membres ont intérêt à la diversité, c’est-à-dire à la présence de personnes de sexes, âges, croyances ou ethnies différentes. Il détaille les règlementations qui garantissent d’égales opportunités à tous et punissent la discrimination en raison du genre, de l’orientation sexuelle, de la nationalité, de la couleur, de la race, de l’origine ethnique, de la religion ou d’un handicap.

Les « égales opportunités » sont garanties par la loi dans tous les pays européens. Toutefois, l’application est différente d’un pays à l’autre.

Lire un curriculum vitae en Grande Bretagne relève de l’herméneutique. Des informations cruciales comme le sexe ou l’âge des candidats sont omises, et aucune photo n’est fournie. Il faut s’efforcer de s’en faire une idée à partir de leur parcours universitaire et professionnel.

Une fois la personne recrutée, la situation est exactement inverse. Les directions de ressources humaines sont vivement encouragées à tenir des statistiques aussi détaillées que possible par genre, âge, groupe ethnique, handicap. En France, on crierait au fichage et on suspecterait des intentions malveillantes. En Grande Bretagne, il s’agit de mesurer les discriminations de manière à les corriger.

(Photo : Marathon de Sao Paulo, The Guardian)

Pays de Galles, mine d’ardoise de Llechwedd

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 La visite des carrières d’ardoise de Llechwedd, près de Blaenau Ffestiniog (Parc de Snowdonia, Pays de Galles du nord) est à la fois impressionnante et émouvante.

Avant la première guerre mondiale, Llechweld exportait 140.000 tonnes d’ardoise, en grande partie vers l’Allemagne. Il reste une exploitation de cette roche, mais à ciel ouvert et sur une moindre échelle. L’ancienne mine, comme le chemin de fer à voie étroite qui acheminait les ardoises au port de Porthmadog, accueillent maintenant les touristes.

La visite de la mine profonde est impressionnante. Une fois équipé d’un casque de chantier, on descend dans la mine par un funiculaire exigu. Des tunnels permettent d’accéder à d’immenses salles évidées de leur roche par des générations de mineurs. C’est un véritable son et lumière souterrain qui, de salle en salle, nous est proposé. Un éclairage multicolore donne aux parois un aspect irréel.  De la harpe, des chœurs gallois, de la musique symphonique donnent à ce moment une épaisseur mystique.

Site Internet : www.llechwedd-slate-caverns.co.uk.

(Photo « transhumances »)