Le Petit Jésus de Prague

Le « Petit Jésus de Prague », une statue de cire de 47cm de hauteur conservée dans une chasse de marbre et de verre dans l’église Notre Dame de la Victoire à Prague, suscite une dévotion qui dépasse largement les limites de la Bohême.

 Le nom de l’église de Notre Dame de la Victoire évoque la miraculeuse intervention de la Vierge aux côtés des armées catholiques à la bataille de La Montagne Blanche (8 novembre 1620), qui conclut les hostilités ouvertes par la défénestration d’envoyés catholiques auprès de La Cour protestante au château de Prague le 23 mai 1618. L’église avait initialement était construite comme temple luthérien. Elle fut restructurée et dotée d’une façade baroque par un architecte italien et confiée en 1624 à l’ordre des Carmes, fondé un siècle plus tôt en Espagne par Thérèse d’Avila et Jean de la Croix.

 C’est de la filière espagnole que vient la statue de l’Enfant Jésus. Elle fut donnée en cadeau par Isabela Manique de Lara y Mendoza à sa fille Maria lorsqu’elle épousa en 1555 le prince Tchèque Vratislav de Pernštejn. Le roi Rodolphe II de Bohême avait épousé la sœur de Philippe II d’Espagne sept ans auparavant. Il y avait un clan espagnol à Prague, consolidé par des alliances matrimoniales. C’est cela qui explique l’extraordinaire floraison baroque à Prague.

 Le Petit Jésus de Prague dispose d’une soixantaine de parures, dont la plus ancienne remonte à 1700. D’innombrables répliques ornent des églises dans le monde et font l’objet de vénération.

 Photo « transhumances ».

Prague en musique

Il est difficile de séjourner en touriste à Prague sans assister au moins à un concert.

 Les églises de Prague rivalisent dans l’organisation de concerts, avec une naturelle inclination pour la musique baroque. Vivaldi, Bach et Mozart tiennent souvent la tête d’affiche. Il y a aussi plusieurs salles de concert prestigieuses, dont le Rudolfinum.

 Nous assistons à la Maison Municipale à un concert consacré aux œuvres les plus connues de Mozart et de Strauss. Le programme a été taillé pour des touristes musicalement incultes, avec des chanteurs en costumes d’époque. Mais le chef d’orchestre est une jolie jeune femme décidée et l’orchestre est de qualité. Le spectacle se déroule dans une salle de style Art Nouveau, comme l’ensemble du bâtiment. Nous prolongeons le plaisir de la musique par un dîner au Restaurant Français, au rez-de-chaussée de la Maison Municipale, dont la décoration est époustouflante.

 L’enfant du pays est Antonín Dvořak (1841 – 1904). Au musée de la musique tchèque, une exposition lui est consacrée. Des panneaux évoquent les différentes étapes de sa vie ; des écouteurs diffusent les œuvres qui leurs sont attachées. Au premier étage du musée est présentée une incroyable variété d’instruments de musique, illustrée par des enregistrements de chacun d’eux.

 Photo « transhumances » : groupe de sculptures baroques dans l’église Saint Nicolas de Prague, l’une des églises proposant des concerts.  

Prague

Comme l’an dernier, une réunion professionnelle nous donne l’occasion de vagabonder dans Prague.

Les touristes n’ont à Prague qu’un désagrément : la horde des touristes qu’eux-mêmes s’emploient à gonfler, sur le Pont Charles, dans les rues qui montent au château, dans les ruelles du quartier ancien de la rive droite de la Vltava et dans les innombrables boutiques de cristal de Bohême.

 Prague procure les émotions de Palerme et de Lisbonne réunies. De Palerme, Prague a l’exubérance baroque, les façades tout en rondeurs, les angelots potelés, la souffrance spectaculaire des vierges et des martyrs. Comme à Lisbonne, les rues sont pavées de blanc et de noir : là on monte au château Saint Georges ; ici, au château dont la plus ancienne église est consacrée à Saint Georges.

 Lisbonne et, plus encore Palerme, donnent parfois l’impression d’un décor de théâtre. Comme elles, Prague est une ville habitée d’âmes errantes et d’éternelle beauté.

 Photo « transhumances » : Prague vue du musée Kampa.

Concert en la cathédrale d’Ely

La cathédrale d’Ely est, comme celle de Chichester à laquelle « transhumances » a consacré récemment un article, est un lieu de spiritualité vivante.

 Ely est une petite ville à une trentaine de kilomètres au nord de Cambridge. Comme celle de Chartres, sa cathédrale domine la plaine environnante et s’aperçoit à des kilomètres de distance. La nef, longue et massive, est de style roman. La principale caractéristique de l’édifice est une tour octogonale construite au quatorzième siècle après que la tour centrale romane se fut effondrée. Le chœur, construit à la même époque, est de style gothique.

 Le Chœur de la cathédrale et l’Orchestre d’East Anglia répètent le concert de ce soir : Vivaldi, Albinoni, Haendel, Bach. L’immense édifice vibre de musique et de sensations. Des œuvres d’art contemporaines amplifient le souffle spirituel venu du fond des siècles : une interprétation de la Vierge Marie en passionaria, la rencontre de Marie Madeleine et Jésus ressuscité dans le style de Giacometti, une immense sculpture en acier représentant à la fois un labyrinthe et une croix d’acier, œuvre de Jonathan Clarke.

 Dans une tribune latérale de la nef a été installé un musée du vitrail. L’essentiel de la collection est consacrée aux dix-neuvième et vingtième siècles. Les Anges Musiciens, vitrail réalisé vers 1910 sur un dessin d’Edward Burne-Jones (1833 – 1898) est magnifique. J’ai été ému par « pictures of violence », œuvre de Rosalind Grimshaw, qui assemble des images réalisées selon des techniques du vitrail différentes.

 Nous étions de passage à Ely, avant de poursuivre notre excursion à Cambridge. Nous sommes restés plusieurs heures dans ce lieu exaltant.

 Photo « transhumances » : Way of life, sculpture de Jonathan Clarke dans la cathédrale d’Ely.