« Places », un nouveau service de Facebook

 

Facebook lance un nouveau service, Places, qui permet aux utilisateurs de savoir instantanément où se trouvent leurs « amis ». Dans le Sunday Times du 26 septembre, le journaliste Stephen Armstrong s’interroge sur la signification sociale de cette innovation.

Lorsqu’il est programmé « par défaut », le service Places permet à une personne de localiser ses « amis » partout dans le monde et de repérer les utilisateurs de Facebook qui se trouvent au même moment dans la même rue ou dans le même restaurant. Chacun peut naturellement se connecter ou se déconnecter du service à tout moment, et il est possible de régler les paramètres de confidentialité pour éviter de communiquer des informations à des indésirables. Des cas de cambriolage ont ainsi été rapportés, les bandits ayant tranquillement consulté Places et mis à profit l’absence des propriétaires de leur domicile pour passer à l’action.

Il y a de grandes différences de comportements dans le réglage des paramètres de confidentialité. Le journaliste cite Alan Redman, un psychologue des affaires. « Il y a des indigènes du numérique, qui y publient tout, et les immigrants du numérique, ou extraterrestres du numérique (« aliens »), qui ne comprennent pas pourquoi. On voit cela clairement sur le lieu de travail. Certains employeurs ne comprennent pas pourquoi les gens révèlent tant de choses de leur vie privée, et il y a eu beaucoup de cas de licenciements avérés à cause de cela. Facebook Places ouvre des questions toutes nouvelles : qu’est-ce que mon employeur devrait savoir de mon comportement ? Est-ce qu’il devrait pouvoir suivre mes mouvements, même si je le laisse faire ? »

Photo « transhumances ».

Britanniques et Français en affaires

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La Chambre de Commerce Française en Grande Bretagne a organisé le 23 septembre un débat sur le thème des relations interculturelles de la France et de la Grande Bretagne dans le monde des affaires.

Peter Alfandary, vice-président de la Chambre de Commerce Française en Grande Bretagne a créé il y a un an un forum pour réfléchir aux différences entre les Britanniques et les Français dans l’approche des affaires. La première manifestation de ce forum fut un débat organisé à la Résidence de France entre Jean-François Decaux, président de Jean-Claude Decaux UK, et Tim Fischer, Country Manager de la Société Générale pour le Royaume Uni. D’un côté un Français installé depuis fort longtemps à Londres ; de l’autre un Britannique travaillant à Londres pour une entreprise française et marié à une Française.

Certaines différences tiennent au mode d’éducation. L’école en France peut être qualifiée de darwinienne : elle vise à sélectionner des individus à l’intelligence supérieure. En Grande Bretagne, on préfère l’encouragement au blâme, le travail en équipe à la concurrence des individus. Dans le monde du travail, un Britannique cherchera le compromis dans un esprit pragmatique ; un Français rédigera des notes lumineuses et s’arc-boutera sur des principes. Un Britannique jugera quelqu’un sur ses compétences et ses réalisations ; pour un Français, sortir premier de Polytechnique reste un avantage professionnel jusqu’à la retraite.

On souligne souvent le côté plus direct des Français, la réticence des Britanniques à exposer leurs sentiments, leur usage systématique de phrases atténuées, « je ne suis pas sûr d’être totalement d’accord avec vous » devant s’interpréter comme « vous avez radicalement tort » ! Les Français ne redouteront pas la confrontation personnelle, les Britanniques peuvent la considérer comme des attaques en dessous de la ceinture. L’humour et l’autodérision sont fréquemment utilisés par les Britanniques, ce qui en fait souvent des orateurs plus efficaces que les Français.

Dans la prise de décision, il semble que les Français aient besoin de plus de certitude que les Britanniques. Si ceux-ci ont un fort sentiment qu’une décision est juste, ils la prendront même s’ils n’ont pas toute l’information à leur disposition.

Les Britanniques semblent parfois obsédés par les seuls actionnaires (shareholders), alors que les Français ont tendance à considérer davantage l’ensemble des parties intéressées à la vie des entreprises, consommateurs inclus (stakeholders). J’avoue pourtant ne pas partager la conclusion selon laquelle la qualité du service serait supérieure en France.

Plusieurs fois dans le débat, l’influence américaine sur la culture des affaires en France comme en Grande Bretagne a été mentionnée, conduisant à une homogénéisation progressive des comportements. Une bonne question est de savoir si la présence massive d’immigrés des cinq continents en Grande Bretagne et dans une moindre mesure en France change aussi les comportements managériaux.

Le forum des relations interculturelles a publié un fascicule curieusement intitulé « lumière au bout du tunnel »  (light at the end of the tunnel) consacré à des réflexions pratiques sur les Français et les Britanniques dans les affaires.  Il passe en revue l’environnement des affaires ; les négociations, réunions et contrats ; le recrutement et la gestion des ressources humaines. Il contient plusieurs citations illustrant le propos. Je citerai celle-ci de Jean Monnet : « l’Anglais ne peut jamais être convaincu par des arguments, seulement par des faits ».

Site Internet de la Chambre de Commerce Française en Grande Bretagne : http://www.ccfgb.co.uk. Photo « transhumances ».

Le Curé d’Ars, un modèle ?

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A l’occasion de la visite du pape Benoît XVI vient d’effectuer en Grande Bretagne, la presse a recueilli de nombreuses tribunes de tendances différentes. The Guardian a ainsi publié le 11 septembre un article virulent de John Cornwell intitulée « le modèle de prêtre du pape : un tyran enragé qui s’inflige du mal ».

On sait que le pape porte une particulière vénération à St Jean Marie Vianney, curé d’Ars (1786 -1859). Le site du Sanctuaire d’Ars, http://www.arsnet.org/, écrit de lui : « très rapidement, sa réputation de confesseur lui attire de nombreux pèlerins venant chercher auprès de lui le pardon de Dieu et la paix du cœur. Assailli par bien des épreuves et des combats, il garde son cœur enraciné dans l’amour de Dieu et de ses frères ; son unique souci est le salut des âmes. Ses catéchismes et ses homélies parlent surtout de la bonté et de la miséricorde de Dieu. »

C’est une autre image que révèle John Cornwell. Selon le Curé, dit Cornwell, (la paroisse d’Ars) « était enfoncée dans le péché. En réalité ses paroissiens étaient enfoncés dans le dur labeur, des conditions difficiles et la pauvreté. De temps en temps ils buvaient et dansaient dans la taverne – pour Vianney « la maison du démon et le marché où se perdent les âmes ».

Danser était un prélude au péché sexuel. Il paya le tavernier pour qu’il s’en allât, de sorte que la danse pût être abolie. Eloignez la tentation et vous éloignerez le péché, tel était son message. Quand il découvrit que des enfants chipaient des pommes de son verger, il abattit les arbres (…)

Afin de prévenir son propre penchant pour le péché, Vianney se fouettait lui-même pendant la nuit avec un fouet fait de morceaux de métal, laissant à sa bonne le soin de laver le sang jusqu’en haut du mur. Sur sa peau, il portait une chemise de crin, une chaine de métal et une corde serrée ou discipline. Il dormait sur un sol de pierre avec pour oreiller une buche. Il se levait à plusieurs reprises la nuit pour prier dans l’église face contre terre. »

On peut, comme John Cornwell, mettre en cause le modèle que représente cet homme dont l’extrême ascétisme  frôlait le masochisme. Il y a aussi du Docteur Knock dans le Curé d’Ars. Non certes dans le cynisme et la cupidité, mais dans la croyance que tout bien portant est un malade qui s’ignore et dans la transformation d’une communauté villageoise en une sorte d’hôpital spirituel tout entier consacré à se prémunir des tourments de l’enfer. Proposer aux prêtres de s’inspirer de Jean-Marie Vianney, n’est-ce pas à l’opposé des valeurs d’ouverture au monde, d’équilibre personnel et de sérénité qui sont si nécessaires aujourd’hui ?

Illustration : Saint Jean-Marie Vianney, Sanctuaire d’Ars.