Chronique d’étonnement n°88

Je souhaite partager dans « transhumances » ce qui m’a étonné, dans ma vie personnelle comme dans l’actualité.

Dans cet article de transhumances, je dis mon étonnement d’être considéré comme un mythe au sein de la structure que j’ai dirigée il y a un quart de siècle. Je ne sais si je dois m’étonner de la proposition du ministre de la Justice de rétablir les peines plancher et de supprimer le sursis du code pénal.

Mythe

J’ai été invité à célébrer le trentième anniversaire de l’organisation que j’ai dirigée à Madrid de 2000 à 2007. Son chiffre d’affaires a été multiplié par dix en un quart de siècle. Trois cents personnes, membres du personnel et agents exclusifs étaient rassemblées dans une ambiance festive où se percevait un fort esprit d’équipe.

J’ai retrouvé avec émotion de nombreux collègues d’autrefois. Certains m’ont dit que j’étais devenu un « mythe ». Une collaboratrice du service d’indemnisation et recouvrement m’a dit combien elle avait été touchée par mon approbation de son analyse d’un dossier litigieux, alors qu’alors elle était toute jeune. Un collaborateur que j’avais recruté pour les ressources humaines se rappelle que j’avais identifié en lui un tempérament commercial ; c’est en effet vers la vente qu’il a évolué au sein de l’entreprise.

Dans la vie professionnelle, comme aujourd’hui dans l’activité bénévole, je me méfie du « syndrome de la momie ». Lorsqu’on est resté trop longtemps dans une fonction, on se trouve respecté, parfumé et enveloppé de bandelettes, irremplaçable. Le passage du temps idéalise les périodes révolues. Je me trouve dans la position du mythe, de la momie. Mais heureusement, remplacé depuis longtemps.

Sursis

Le ministre de la Justice Gérald Darmanin, un habitué des chroniques d’étonnement, a surfé sur la vague d’indignation pour les agressions et dégradations commises le soir de la finale de Coupe d’Europe pour une nouvel effet d’annonce.

« Il faut faire évoluer radicalement la loi : supprimer les aménagements de peine obligatoires, supprimer le sursis et mettre en place par la loi une condamnation minimum systématique une fois la culpabilité reconnue », a-t-il écrit sur le réseau social X. Ajoutant : « Par exemple, trois mois de prison ferme (réellement exécutés) minimum pour toute agression envers un représentant de l’Etat ou encore une amende très élevée pour toute destruction. »

Il annonce donc le retour des peines-plancher instituées lors de la présidence Sarkozy, rebaptisées « peines minimales ». La suppression du sursis est également d’une grande portée. Accorder un sursis à l’exécution d’une peine donne à un condamné une chance de changer de comportement, l’incite à ne pas récidiver. Supprimer le sursis suppose que des personnes qui ont enfreint la loi sont irrémédiablement mauvaises. Le changement législatif proposé par le ministre relève d’un pessimisme profond sur la nature humaine.

Une telle loi aurait un effet immédiat : accroître le nombre de personnes emprisonnées, alors qu’il excède déjà le nombre de places disponibles et rend la gestion des prisons de plus en plus problématique. La démagogie et l’irresponsabilité qui inspirent ces propositions font peur.

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *