« Conclave », film d’Edward Berger sorti en salles en 2024, est un thriller captivant dans lequel l’élection d’un nouveau pape résulte de luttes politiques sordides, de l’affrontement de conceptions différentes de la foi et d’une interrogation sur le rôle des femmes dans l’Église catholique.
À la mort du pape, le Cardinal Thomas Lawrence, doyen du Sacré Collège, est chargé d’organiser le conclave qui élira son successeur. Dans son prêche inaugural, il exhorte les cardinaux à ne pas se laisser brider par les certitudes, de se permettre le doute, de se laisser bousculer par l’Esprit Saint.
L’inattendu ne tarde pas faire irruption, sous la forme d’un homme qui se présente comme l’archevêque de Kaboul nommé « in pectore » (en secret) par le pape défunt. Il s’appelle Benitez, il est admis au conclave et obtient quelques voix aux premiers tours de scrutin.
Les tours de scrutin se succèdent. En coulisse, les ambitieux s’efforcent de couler leurs concurrents à coups d’achats de votes et de révélation de scandales sexuels. Les scènes d’enfer du plafond de la Chapelle Sixtine semblent faire écho à la perversité ambiante.
Une lutte au couteau se déroule entre progressistes (le cardinal Bellini, joué par Stanley Tucci) et réactionnaires (le cardinal Tedesco, joué par Sergio Castellito) . Un attentat islamiste semble donner raison à ces derniers qui appellent à une guerre de religions. Mais leur exacerbation fait peur et leur barre la route au pontificat.
C’est la dimension féminine du film – et son effacement dans un Vatican dogmatiquement masculin – qui constitue une vraie surprise pour le spectateur. En coulisse, Sœur Anna (Isabella Rossellini), responsable de l’hôtellerie-restauration du conclave, joue un rôle clé pour déjouer conspirations et complots. La dernière scène, dans laquelle le pape nouvellement élu révèle un invraisemblable secret intime, ouvre la possibilité d’une rupture avec le masculinisme de l’Église catholique.
La photographie du film, qui insiste sur le contraste du blanc, du noir et du rouge, est remarquable, tout comme la bande son de Volker Bertelmann, qui souligne l’ambiance anxiogène de ce conclave dans lequel, comme l’avais souhaité le cardinal Lawrence, rien n’est joué d’avance.


