Quand j’étais chanteur

La chaîne de télévision culturelle britannique BBC Four a programmé récemment, une fois n’est pas coutume, un film français : « quand j’étais chanteur », de Xavier Giannoli (2006), avec Gérard Depardieu et Cécile de France.

Un artiste vieilli, crooner de bals et de maisons de retraite, tombe amoureux d’une jeune femme de trente ans sa cadette. Alain Moreau (Gérard Depardieu) est las de la routine mille fois répétée, las de voir depuis la scène les couples se faire et se défaire, las de sa relation pas claire avec Michèle, qui partagea sa vie comme amante et la partage aujourd’hui comme son manager. Marion (Cécile de France) est sous le coup d’une rupture, au désespoir de ne pouvoir s’occuper correctement de son jeune fils Martin. Continuer la lecture de « Quand j’étais chanteur »

Paul Nash

  

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La Dullwich Picture Gallery, dans la banlieue sud de Londres, propose une exposition intitulée « Paul Nash, les éléments ».

La galerie de peinture Dullwich a été construite par l’architecte John Sloane en 1811 pour accueillir une collection permanente de peintures de grands maîtres européens des dix-septième et dix-huitième siècles. On y trouve des Murillo, des Rubens, des Rembrandt entre autres.

La galerie accueille jusqu’au 9 mai une exposition consacrée à l’un des plus grands peintres paysagers britanniques, Paul Nash (1889 – 1946). Le magazine Time Out lui a consacré un bel article signé par Ossian Ward (http://www.timeout.com/london/art/event/79655/paul-nash).

Paul Nash a été peintre officiel pendant les deux guerres mondiales. L’une des ses peintures, « nous fabriquons un nouveau monde », évoque l’horreur du champ de bataille d’Ypres, avec ses arbres déchiquetés se découpant dans un paysage sombre et glauque. L’inspiration est proche de celle d’Otto Dix. Quelque vingt cinq ans plus tard, « Totes Meer », Mer Morte, représente un cimetière de bombardiers allemands abattus par l’artillerie britannique par un clair de lune, et de l’amas de ferrailles c’est une impression de calme qui se déprend.

Bien que ne s’étant jamais assumé comme surréaliste, l’œuvre de Nash entre les deux guerres subit leur influence. Il y a, dit Ossian Ward, d’étranges vues intérieures / extérieures montrant le plafond comme ciel, les murs comme forêt et le sol comme mer, visions par Nash de paysages disjoints situés derrière lui et reflétés par un miroir.

J’ai en particulier aimé l’une des dernières de ses toiles, « Paysage de l’équinoxe d’hiver », daté de 1943. C’est elle qui illustre cet article (source Time Out).

Santo subito?

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La béatification de Jean-Paul II, officieusement prévue pour octobre, pourrait être retardée sine die. Le miracle attendu par les partisans de sa canonisation immédiate (« Santo Subito ») se fait attendre.

Un miracle est nécessaire pour avancer sur la voie de la béatification puis de la canonisation. Dans l’édition du 6 mars du quotidien britannique The Guardian, John Hooper indique que le miracle de la guérison de la religieuse française Sœur Marie Simon-Pierre par l’intercession du défunt pape Jean Paul II en 2007 pourrait ne pas être retenu dans le procès canonique le concernant. Citant le journal polonais Rzeczpospolita, le quotidien indique en effet que la religieuse pourrait avoir été atteinte non du Parkinson mais d’une maladie nerveuse similaire et différente, susceptible de rémissions alors que le Parkinson est incurable. De plus, âgée de 49 ans, elle aurait fait une rechute de la même maladie.

On conçoit la frustration des partisans du « Santo Subito ». Jean Paul II a fait béatifier l’auteur du Syllabus, Pie IX, en 2000, et canoniser le fondateur de l’Opus Dei José María Escriva de Balaguer en 2002. N’a-t-il pas été désigné, en 2000, comme l’objet de la troisième révélation de la Vierge à Fatima ? Défenseur intransigeant de la Doctrine, n’a-t-il pas droit à sa place au Panthéon des saints catholiques ? Il semble que les médecins, ou la Providence, fassent de la résistance.

(Photo : Vatican).

Disconnect

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Le Royal Court Theatre de Londres donne jusqu’au 20 mars « Disconnect », une pièce de Anupama Chandrasekhar, jeune dramaturge basée à Chennai en Inde. Elle met en scène une équipe d’opérateurs d’un call centre de Chennai affectés au recouvrement de créances privées dans l’Illinois.

Le premier personnage à entrer en scène est une manager, Jyothi. « OK, je suis Jyothi, en vérité. Les gens m’appellent Sharon (rires). J’étais Jennifer pour les appels entrants et Michelle pour les appels sortants. Mais j’ai toujours voulu être Kate, comme Winslet. Ou Hudson. » Dès le début, le ton est donné. Les personnages sont indiens, mais leurs interlocuteurs au bout du fil sont des débiteurs américains et à force de se faire passer pour leurs voisins et de contrefaire leur accent, ils finissent par laisser pénétrer le rêve américain au tréfonds de leur âme.

Jyothi reçoit dans son bureau un superviseur d’environ 45 ans, Avinash. Elle lui explique que selon tous les critères d’évaluation, A- aptitude, B- attitude, C- performance, D- engagement, il tombe dans la catégorie des employés à basse performance. Puisqu’il ne réussit pas à New York, il est muté à une région moins stressante : l’Illinois. Où est l’Illinois ? demande Avinash. Au quatrième étage, répond Jyothi Sharon.

La nouvelle équipe d’Avinash est composée de trois jeunes Indiens : Vidya, alias Vicki Lewis ; Giri, alias Gary Evans ; Rohan, alias Ross Adams. Ils travaillent de nuit, quand il fait jour à Chicago, et, contrefaisant l’accent américain, prétendent qu’ils appellent de Buffalo. Leur salaire est fonction d’objectifs de sommes recouvrées presque inatteignables. Ils doivent suivre à la lettre un script détaillé. Mais ils doivent aussi s’adapter aux situations et aux personnalités qu’ils rencontrent au bout du fil : les débiteurs ont divorcé, ont perdu leur emploi, ou ont tout simplement perdu la tête, cédant pour un moment à une frénésie de consommation dont ils n’ont pas les moyens. Tous les moyens sont bons, cajolerie, flatterie, menace : « vous avez fait une promesse. C’est le moment de la tenir. Voulez-vous que vos fils sachent que vous êtes un menteur et un tricheur ? Parce que si vous ne payez pas, c’est ce que vous êtes. Arrêtez de pleurer. Soyez quelqu’un dont vos fils seront fiers », dit Vidya à un débiteur, Harry Coltrane. Coltrane se suicidera une heure plus tard, plongeant Vidya dans une crise personnelle et professionnelle.

Giri s’est lui aussi endetté, à l’image des débiteurs qu’il poursuit. Sa vie dépend de son bonus. Ross finance par son travail les études de son frère à l’étranger et rêve d’émigrer. Il fantasme sur une débitrice de Chicago, Sara, imaginant qu’il entre avec elle dans une relation extra-professionnelle qui lui permettra de fuir Chennai. Usurpant l’identifiant du superviseur, il annule sa dette. Mais Sara, loin de lui en savoir gré, poursuit la compagnie en justice pour harcèlement. Insensible à la catastrophe, Ross, licencié de l’entreprise et menacé de poursuites pénales, contemple dans la nuit la décharge voisine du call centre et y voit Chicago, ses buildings et ses lumières.

Peu de livres ou de scénarios évoquent la vie professionnelle d’aujourd’hui. « Disconnect » d’Anupama Chandrasekhar est une exception. Magnifiquement jouée, intelligemment mise en scène malgré un espace exigu, sa pièce nous offre un bon moment de théâtre.

(Photo The Times : Nikesh Patel dans le rôle de Ross et Ayesha Dharker dans celui de Vidya)