Troublante Emma

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La Tate Britain de Londres est essentiellement consacrée aux peintres britanniques. Dans l’une des salles, consacrée à l’art du portrait au dix-huitième siècle, je suis fasciné par un tableau de 1787 représentant Emma Hamilton, l’amante de l’Amiral Nelson, par George Romney. Emma, ici dans le rôle de la sorcière Circé, nous fixe d’un regard troublant. Ses longs cheveux châtains sont apprêtés dans un mouvement circulaire qui nous entraîne dans une ronde vertigineuse. 

Romney a consacré à Emma plusieurs portraits et avait manifestement pour elle plus que de l’admiration ou de l’affection. « Emma Hamilton en Circé » est inachevé. Peut-être pour cela, il possède une force exceptionnelle. C’est l’œuvre d’un amoureux ensorcelé.

(Photo tirée de Wikipedia)

Nelson Mandela, 20 ans

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Il y a vingt ans, le 11 février 1990, Nelson Mandela sortait de la prison Victor Verster après 27 ans de captivité. Dans le quotidien britannique The Guardian, Justice Malala, de Johannesburg, évoque cet événement.

Justice avait 19 ans lorsque l’ANC fut légalisée. La foule noire chantait et pleurait. « Il y avait toutefois quelque chose d’anormal. La foule était suivie par des véhicules de police, mais il n’y avait pas de gaz lacrymogènes ni de coups de feu en l’air. La police se contentait d’escorter la foule, elle ne tirait pas de grenades lacrymogènes sur les gens comme moi et tant d’autres nous y étions habitués. Ceux qui portaient un uniforme semblaient aussi tétanisés (shell-shocked) que les manifestants ».

Quelques jours plus tard, Mandela était libéré. « Quand Mandela émergea finalement de la prison tenant sa femme Winnie Mandela par la main, il y eut des pleurs et des youyous. Nous ne pouvions bouger. Nous ne pouvions que pleurer. En l’espace de quelques minutes, les gens sortaient de leurs maisons, criant et hurlant et chantant. C’était fou. Dans tous les townships, une jubilation sans précédent se répandit. Je n’avais jamais entendu tant de gens chanter, vu tant de pleurs et de joie en même temps ».

Justice rappelle l’œuvre de Mandela pour la vérité et la réconciliation. Il souligne pourtant que « l’Afrique du Sud que nous a léguée Mandela n’est pas toujours un endroit où il fait bon vivre. Le magazine Lancet, dans une étude publiée l’an dernier, disait que depuis 1994 l’espérance de vie en Afrique du Sud a diminué de près de 20 ans. Le taux d’homicide est cinq fois la moyenne globale. Le taux d’homicide féminin est six fois la moyenne globale. On estime qu’une femme est tuée par son partenaire toutes les six heures en Afrique du Sud. Pire, l’Afrique du Sud est l’un des 12 pays seulement où la mortalité infantile a augmenté depuis 1990, l’année de la libération de Mandela. Chaque année, 23.000 enfants sont morts nés, et presque 75.000 enfants meurent en Afrique du Sud, dont près d’un tiers dans leurs premières quatre semaines de vie. »

« Mandela n’a pas voulu cela pour nous », disent les gens en parlant des frasques de l’actuel président Zuma. « L’ignominie de Zuma nous rappellera (en ce jour de vingtième anniversaire) que la nouvelle Afrique du Sud n’est pas tout ce que nous voulions qu’elle soit en ce jour lointain de 1990. Mais nous danserons et nous verserons peut-être une larme et nous célébrerons encore la vie de Mandela. Je sais, nous savons, que le l’endroit où nous étions quand en 1990 Mandela marcha hors de sa prison était infiniment pire que celui-ci : seulement une précieuse jeune démocratie comme les autres. »

(Photo : libération de Nelson Mandela)

Pédale collante

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 Beaucoup a été dit sur la crise de la « pédale collante » : le constructeur japonais Toyota a du rappeler 3,8 millions de voitures dont la pédale d’accélérateur était susceptible de rester collée au plancher. Il y a un aspect qui me semble mériter attention.

Dans l’hebdomadaire britannique The Observer du 7 février, on peut lire : « il a depuis lors émergé que Toyota avait eu connaissance de plaintes de consommateurs au sujet de telles pédales  d’accélérateur « collantes » au Royaume Uni depuis la fin de 2008. Toyota admet que 26 des cas qu’il a rencontrés en Europe furent rapportés comme « questions de satisfaction-client » à l’époque. »

Toyota disposait certainement de procédures élaborées de gestion des plaintes. Certaines prenaient le chemin de la satisfaction-client, d’autres celui de la sécurité. On comprend pourquoi des techniciens ou des concessionnaires ont choisi le premier. Le second pouvait mener à une bombe, celle qui vient précisément d’éclater. Personne ne s’est trouvé au carrefour des deux chemins et n’a posé la question du risque potentiel que faisait courir aux conducteurs des véhicules incriminés et aux autres usagers de la route une pédale d’accélérateur qui reste enfoncée.

Les grandes organisations ont déployé des outils de gestion du risque opérationnel perfectionnés. Mais la complexité les rend parfois sourdes et aveugles, collées aux habitudes.

L’humour de Steve Bell

 

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Les caricatures de Steve Bell dans le quotidien britannique The Guardian sont une merveille d’humour et de pertinence. Je ne résiste pas au plaisir de reproduire celle-ci, réalisée d’après Charles Adams, qui fait suite aux récrimitations du pape contre les lois britanniques contre les discriminations. Le pape semble étonné de se retrouver en compagnie de personnages aussi bizarres, mais il est l’un d’entre eux.