Justice15 février 20202Surpopulation carcérale et droits de l’homme

La Cour Européenne des Droits de l’Homme a condamné la France le 30 janvier dernier pour les traitements inhumains et dégradants infligés aux personnes détenues et pour l’absence de recours effectif.

L’arrêt de la CEDH fait suite aux plaintes déposées par trente-deux personnes détenues dans les centres pénitentiaires de Ducos (Martinique), Faa’a Nuutania (Polynésie française), Baie-Mahault (Guadeloupe) ainsi que dans les maisons d’arrêt de Nîmes, Nice et Fresnes.

« La Cour estime que les requérants ont, pour la majorité d’entre eux, disposé d’un espace personnel inférieur à la norme minimale requise de 3 m² pendant l’intégralité de leur détention, situation aggravée par l’absence d’intimité dans l’utilisation des toilettes. Pour les requérants qui ont disposé de plus de 3 m2 d’espace personnel, la Cour considère que les établissements dans lesquels ils ont été ou sont détenus n’offrent pas, de manière générale, des conditions de détention décentes ni une liberté de circulation et des activités hors des cellules suffisantes.

Source : Contrôle général des lieux de privation de liberté

« La Cour a jugé en outre que les recours préventifs – le référé-liberté et le référé mesures utiles – sont ineffectifs en pratique. La Cour considère que le pouvoir d’injonction du juge administratif a une portée limitée. Malgré une évolution favorable de la jurisprudence, la surpopulation carcérale et la vétusté de certains établissements font obstacle à la possibilité, au moyen de ces recours offerts aux personnes détenues, de faire cesser pleinement et immédiatement des atteintes graves aux droits fondamentaux. »

La CEDH cite la maison d’arrêt de Nîmes, d’une capacité de 192 places, mise en service en 1974. « Le taux de surpopulation y était de 215 % en février 2015. L’Observatoire international des prisons (OIP) et l’ordre des avocats au barreau de Nîmes initièrent en 2015, un recours en référé-liberté afin de faire cesser les atteintes graves aux libertés fondamentales des détenus. En janvier 2019, le taux de surpopulation était de 205 %. Les requérants se plaignent de la vétusté des cellules qu’ils doivent parfois partager avec des détenus très âgés dont ils doivent s’occuper. Ils se plaignent du bruit et des odeurs, de l’absence de ventilation et d’isolation thermique et du défaut d’hygiène. »

L’opinion publique a tendance à considérer que ceux qui sont emprisonnés « l’ont bien cherché », « n’ont que ce qu’ils méritent ». Elle oublie que toute personne incarcérée a vocation à sortir un jour, et que le manque de respect à leur égard se paie par un lourd passif de frustrations qui rend problématique un retour pacifié dans la société.

Dans un colloque récent au Sénat, la FARAPEJ, qui rassemble des individus et fédère des associations qui agissent pour la Justice et souhaitent développer une réflexion au service de l’action, a proposé un plan volontariste en dix points pour réduire la population carcérale, renforcer les moyens consacrés à l’accompagnement des peines effectuées « dans la communauté » et réduire ainsi le risque de récidive.

 

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