Dans son film « Fuori », le réalisateur Mario Martone raconte quelques mois de la vie de l’écrivaine Goliarda Sapienza (1924 – 1996), après sa libération de prison en 1980.
« Transhumances » a récemment rendu compte du récit, par Goliarda Sapienza, de son séjour dans la prison romaine de Rebibbia à la suite d’un vol de bijoux pendant une soirée mondaine. Sortie de prison, Goliarda (Valeria Golino) se trouve isolée. Le roman sur lequel elle a travaillé pendant des années, L’Art de la Joie, n’a pas trouvé d’éditeur. Elle cherche à se faire employer comme femme de ménage, mais elle n’a ni l’âge ni l’expérience pour cela.
Goliarda se raccroche à ses deux codétenues, le « palais de l’amitié » comme elles désignent leur cellule : Roberta (Matilda Da Angelis) et Barbara (Elodie). Le livre « l’Université de Rebibbia » se terminait d’ailleurs par l’émeute provoquée parmi les détenues par la tentative de suicide de Barbara). Martone a eu l’autorisation de reconstituer cette scène, au sein même du quartier femmes de la prison de Rebibbia, avec des femmes détenues.
Roberta était une détenue « politique », en raison de son engagement dans les Brigades rouges. Elle est aussi profondément enracinée dans la délinquance, n’hésitant pas à voler pour se procurer sa dose d’héroïne et à « emprunter » des voitures, de préférence de luxe, qu’elle met en route en joignant les fils du démarreur.
Goliarda rejoint Roberta dans ses errances romaines. Les deux femmes s’aiment, se disputent, se séparent mais ne peuvent que se retrouver, se réconcilier, se pardonner, fixer un nouveau rendez-vous dans un lieu improbable. Elles sont maintenant « fuori », hors de la prison. Mais ce qu’elles ont vécu ensemble est si fort et le monde du dehors si violent, qu’elles s’y sentent enfermées, comme lorsqu’elles étaient « dedans ». Les pensées suicidaires affleurent.
Barbara, quant à elle, tente de vivre une vie conventionnelle, comme propriétaire d’un commerce de parfums dans un quartier populaire. Goliarda, Barbara et Roberta se retrouvent à la porte de Rebibbia pour accueillir Suzie lors de sa libération. Elles font le tour de la prison, et, arrêtées devant les fenêtres où restent emprisonnées leurs anciennes camarades, chantent une mélodie reprise de l’autre côté des barreaux.
Ancienne voleuse de bijoux, Goliarda est accusée par Roberta d’être devenue voleuse de vies, observant silencieusement ses amies pour les inclure dans ses récits. Pourtant, sur le point d’être de nouveau emprisonnée, c’est à elle qu’elle confie une mallette remplie de lettres de militants, à qui elle saura donner une résonnance.
« Transhumances » a rendu compte de plusieurs films de Mario Martone, en particulier son biopic du poète Giacomo Leopardi.


