Piégés à Tenerife

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Dans le quotidien britannique The Guardian du 19 avril, Gill Hornby donne un récit plein d’humour de son séjour forcé à Tenerife, à la suite de l’annulation de tous les vols.

(…) Nous y voilà encore. A Tenerife. Sous le ciel d’un bleu ennuyeux. Scrutant la mer sans ferries. Piégés.

 Bien sûr nous sommes parmi les fortunés. Nous ne dormons pas dans les rues ou les terminaux d’Europe continentale, nous avons encore nos chambres d’hôtel. Nos vacances ont juste, en théorie, été prolongées. Sauf que, à ce qu’il semble, les vacances sont une question de choix. Il faut vouloir être en vacances, ou bien cela cesse d’être des vacances. Et quiconque nous a envoyé des SMS « profitez bien ! » ou « jaloux » peut s’attendre à un shampooing à notre retour.

Notre brève ruée sur le « paradis » a perdu son charme lorsque le nuage de cendres a perdu son côté drôle, autour de l’heure du thé jeudi. (…)

Depuis lors, la station touristique a changé d’identité. Nous ne sommes plus des hôtes, nous sommes des captifs. Nous en avons assez des frites – imaginez-vous ! – assez de Sky News, assez du soleil. Nous nous trouvons d’une drôle de couleur, comme des criminels en attente d’extradition : le brun d’un braqueur de banque.

 Photo : Le Teide, sommet de l’île de Tenerife, un volcan loin de l’Islande ! www.hotasa.es.

Mrs Reynolds et le voyou

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Le Palace Theatre de Watford donne actuellement une pièce de Gary Owen, « Mrs Reynolds and the ruffian » (le voyou). Elle nous parle d’une manière tendre de sujets actuels, le mal des banlieues et le droit à mourir dans la dignité.

Gary Owen est un scénariste de 28 ans dont les pièces sont enracinées dans sa ville adoptive, Bridgend (Pays de Galles), une cité glauque, célèbre en Grande Bretagne pour l’épidémie de suicides qui a emporté plus de 20 jeunes depuis trois ans. C’est précisément l’histoire d’un jeune sans perspectives et sans espoir que nous conte sa dernière pièce, Mrs Reynolds et le voyou.

Le voyou se nomme Jay. Il comparait devant la juge pour avoir saccagé le jardin d’une dame d’une soixantaine d’années, Mme Reynolds. La juge lui propose une peine d’intérêt général au lieu de la prison : il aidera sa victime à remettre son jardin en état. Bien que jeune, la juge se comporte en vraie professionnelle : elle dépassionne, reformule, propose. Pourtant, elle passe à côté de la motivation de Jay. Celui-ci se dit contrit d’un écart passager. En réalité, il a prémédité l’attaque du jardin et feint la repentance pour échapper à la prison.

Elle passe aussi à côté de la motivation de Mme Reynolds. Elle la croit désintéressée. En réalité, le saccage du jardin est arrivé au moment où le médecin vient de lui apprendre qu’atteinte d’une maladie dégénérative, ses jours sont comptés. Son mari est mort, ses enfants sont loin. Ray est l’être humain que le destin lui envoie. Elle lui offre la rédemption, mais attend de lui qu’il la sauve à ton tour de l’enfer qui l’attend.

Un ami de Jay, Kieran, le tire vers son passé. La jeune voisine d’en face, Mel, le pousse vers un avenir tout à inventer.

Les personnages de Mme Reynolds et de Jay sont magnifiquement interprétés par Trudie Goodwin et Morgan Watkins, avec une sensibilité non dénuée d’humour. La mise en scène est de Brigid Larmour, la directrice artistique du Palace Theatre. Au centre de la scène se trouve un mur chargé de graffitis qui se convertissent peu à peu en jolis dessins, à mesure que Mme Reynolds conquiert le cœur de Jay, l’aide à composer avec les atroces blessures de son enfance, parvient à le décentrer de soi-même et l’amène peu à peu à vivre pour deux femmes, Mel et elle-même.

(Photo : Mrs Reynolds and the Ruffian, Watford Palace Theatre).

Constantin, Empereur de York à Milan

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 Quel est le point commun entre York et Milan ? L’empereur Constantin (272 – 337) !

Le blocage du transport aérien en Europe nous a frustrés d’un week-end a Milan. Puisque les valises etaient bouclées, nous les avons simplement placées dans la voiture et, profitant d’un temps radieux, quitté Watford pour le nord de l’Angleterre.

Nous avons traversé la région des Midlands – un premier clin d’œil à Milan ! – passé la nuit à Stamford, charmante petite ville de pierres blanches, visité l’immense cathedrale gothique de Lincoln et rejoint la ville de York.

A proximité de l’entrée du « Minster » (Cathédrale), un hôte de marque nous attendait : Constantin a ici sa statue. Le 23 juillet 306, au lendemain du décès de son père, c’est àYork que, par acclamations, ses légionnaires le proclamèrent empereur. Cinq ans plus tard, il promulga l’édit de Milan qui garantit la liberté religieuse et permit l’essor du Christianisme.

Grâce à Constantin, nous avons d’une certaine manière accompli à York notre pèlerinage milanais !

(Photo : visage de l’Empereur Constantin, excavations de la Cathedrale de York)

Le camp de la peur

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Evoquant les rumeurs sur le couple Sarkozy, Pierre Charon, conseiller du président, a stigmatisé « une sorte de complot organisé avec des mouvements financiers » et souhaité « que la peur change de camp ».

Sous la plume d’Arnaud Leparmentier, Le Monde relate cette affaire dans son édition du 9 avril. Je relève une phrase de son article. Ami de Charon, le ministre de l’intérieur Brice Hortefeux minimise le côté martial de ses déclarations : « la peur doit changer de camp ? C’est une expression que Charon utilise à tout bout de champ ».

La minimisation de la portée de ces propos ne rassure pas vraiment. Il semble qu’à tout bout de champ, le conseiller du président de la République s’emploie à ce que la peur change de camp. Il y a quelque chose d’inquiétant dans cette conception de la politique comme une lutte où il s’agirait d’ancrer la peur dans les entrailles des ennemis.

Il est temps sans doute de retrouver le sens du respect démocratique.

Illustration : la terreur d’Isaac par Le Caravage