Guadeloupe, forêt tropicale

Végétation tropicale

La route de la Traversée permet de rejoindre l’ouest de l’île Basse Terre à partir de Pointe à Pitre en pénétrant dans le Parc National de la Guadeloupe, qui inclut aussi le volcan de la Soufrière.

 Après une halte à la jolie Cascade des Ecrevisses, on rejoint la Maison de la Forêt. Deux parcours de découverte de la forêt tropicale ont été organisés. Bien que nous soyons en saison sèche, il pleut abondamment et le sentier est boueux. Tout autour de nous, nous respirons l’humus, ce qui ne peut que ravir l’auteur de « transhumances » ! La lumière, rare dans le sous-bois épais, se reflète sur les feuilles trempées et les gouttes d’eau semblent des diamants.

Oiseau trembleur

 Les arbres sont d’une hauteur inhabituelle pour les randonneurs des futaies européennes. Fougères et feuillages ont eux-mêmes un gabarit hors du normal. De longues racines aériennes pendent comme des lianes. Nous rencontrons une mangouste et des oiseaux trembleurs nous observent alors que nous nous protégeons de la pluie sous un carbet.

Guadeloupe, Pointe à Pitre

 

Pointe à Pitre, rue Frébault

La capitale économique de La Guadeloupe, Pointe à Pitre, n’a guère d’atouts touristiques. Mais arpenter ses rues permet de saisir quelques aspects de la vie des Guadeloupéens.

 Entrer dans Pointe à Pitre par le quartier du Carénage laisse une impression de pauvreté. Les rues sont bordées de petites maisons en bois délabrées et de minuscules échoppes ; de nombreuses personnes errent désœuvrées ; les jardins sont encombrés de carcasses de vieilles voitures, de gravats et de déchets ; la circulation automobile semble anarchique. Au centre ville même, beaucoup de bâtiments ne sont pas ravalés et tombent en décrépitude. Il y a un vrai malaise social dans l’île, manifesté en 2009 par la grande grève contre la « pwofitasyon » (« profitation » = exploitation par les profiteurs).

 Pourtant, descendre la rue Frébault et entrer dans les innombrables boutiques d’habillement corrige l’impression première. Si l’urbanisme semble décadent, le corps, en particulier celui de la femme, est exalté. Les tissus sont riches de couleurs et de matière, la coupe des robes est créative et le chapeau ou le foulard, souvent absents en Europe, font pleinement partie de l’image que l’on veut donner de soi-même.

 

Pointe à Pitre, église Saint Pierre et Saint Paul

Il y a peu de monuments remarquables à Pointe à Pitre. L’un est le musée Saint John Perse, une ancienne maison créole réhabilitée. L’autre est l’église Saint Pierre et Saint Paul, construite sous sa forme actuelle en 1853, dix ans après qu’un tremblement de terre eut détruit l’édifice précédent. Elle fut conçue en utilisant des structures métalliques similaires à celles des Halles Baltard de Paris. L’espace intérieur est particulièrement vaste et harmonieux.

A la Guadeloupe

Le Gosier, centre ville

A l’invitation du frère de Brigitte et de son épouse, nous avons passé quelques jours de vacances et de découverte à la Guadeloupe. « Transhumances » va livrer, en plusieurs épisodes, le récit de notre séjour.

 Dans l’avion d’Orly à Pointe à Pitre, je parcours le Guide du Routard. Je réalise avec humilité que ma connaissance de la géographie des Caraïbes est rudimentaire. La Guadeloupe est un archipel composé de plusieurs îles, Grande Terre, Basse Terre (qui porte mal son nom car c’est là que se situe le principal relief, le volcan de la Soufrière), Les Saintes, Marie-Galante et La Désirade. Cet archipel est situé sur une ligne de faille en forme d’arc dont l’extrémité sud se situe à l’est du Venezuela (Trinidad et Tobago) et le nord aux grandes îles de Porto-Rico, Saint Domingue / Haïti et Cuba. Du sud au nord, on trouve Grenade et Saint Vincent, Sainte Lucie, La Martinique, La Dominique, La Guadeloupe et un chapelet d’îles indépendantes ou sous souveraineté britannique, française ou néerlandaise, où l’on roule à droite ou à gauche selon les caprices de l’histoire.

 L’appartement de nos hôtes se situe au Gosier, une station balnéaire à quelques kilomètres de la capitale économique, Pointe à Pitre. La plage est à quelques centaines de mètres. La ville tire son nom des « gosiers », pélicans bruns dont les vols planés, brutalement interrompus par des plongées en piqué, sont impressionnants. Sur la terrasse de l’appartement, de jolis oiseaux au poitrail jaune, les « sucriers », se délectent de la cuillérée de sucre roux que nous leur laissons.

 L’urbanisme du Gosier semble assez anarchique. Le front de mer est bâti d’hôtels dont certains sont à l’abandon. On trouve quelques immeubles récents, mais l’habitat le plus fréquent est la case individuelle environnée d’un petit jardin.

 La nuit tombe vite à La Guadeloupe. Le crépuscule marque une frontière : en-deçà, les boutiques sont rues sont vibrantes d’animation, les boutiques attirent le chaland, on entend de la musique de partout ; au-delà, la majorité des gens rentrent chez eux et les grenouilles emplissent l’espace public d’un son qui ressemble à celui d’une roue mal huilée. Au Gosier, on rencontre toutefois un cours de Salsa à la terrasse d’une maison des jeunes, un stade puissamment éclairé où s’entraînent des footballeurs et la plage La Datcha, illuminée depuis 4h 30 du matin et jusqu’à 23h le soir.

 Beaucoup de Guadeloupéens sont propriétaires d’un terrain et de leur maison. Les cases sont souvent vastes. Les toits en acier sont d’une multitude de couleurs, ce qui apporte une touche de gaieté. Même les citadins possèdent un petit cheptel, bœufs, zébus, chèvres ou moutons. Lorsqu’ils ne disposent pas d’un pâturage, ils laissent leur(s) bête(s) brouter au bord des routes, attachée(s) par une chaine à un pie, souvent accompagnée(s) par des oiseaux blancs qui se font un régal de leurs parasites.

 

Boeuf accompagné de ses "nettoyeurs"

 La majorité de la population est noire et de grande taille. Les lecteurs de « transhumances » excuseront la trivialité de l’observation suivante : dans les toilettes publiques, les urinoirs sont placés à une hauteur inhabituellement grande, ce qui rend périlleuse leur usage par des personnes non bâties selon le format local.

 Au cours de notre voyage, avons eu la chance de visiter les îles principales, Grande Terre et Basse Terre, mais aussi Marie Galante et les Saintes. Nous avons été émerveillés par la diversité des paysages qui composent la Guadeloupe. Les contrastes sont saisissants. Basse Terre offre des similitudes avec La Réunion : les versants du volcan de la Soufrière sont pentus et, dans leur partie inférieure, plantés de canne à sucre ; les vagues de l’océan atlantique et de la mer des Caraïbes battent les falaises de roche noire déchiquetée. Au centre de Grande Terre, les Grands Fonds sont un dédale de petites vallées densément peuplées, peu profondes et pourtant aux pentes abruptes ; au nord-est, du Moule à la Pointe des Châteaux, la côte ressemble à celles de Bretagne ou de Cornouailles.

L'île de la Désirade vue de la Pointe des Châteaux

Art Nouveau à Nancy

Le Musée de l’Ecole de Nancy est tout entier consacré à l’Art Nouveau dans une variété de disciplines : ébénisterie, céramique, luminaire, verrerie, vitrail.

 Nous avions été enthousiasmés par la visite du Musée Horta à Bruxelles. La maison d’Eugène Corbin à Nancy offre les mêmes émotions. Elle nous transporte au tournant des dix-neuvième et vingtième siècles. Dans la ligne des précurseurs britanniques John Ruskin et William Morris, des artistes nancéens s’inspirèrent de la nature. Leur mobilier, leurs vitraux, leurs céramiques sont habités d’arbres, de fleurs, d’oiseaux. Les lignes sont féminines, toutes en courbes, sans rupture ni aspérité. C’est un art total, débordant de vitalité, de couleurs, de chaleur.

 Les artistes de l’Ecole de Nancy sont nés pour la plupart vers 1850 : l’ébéniste Eugène Vallin qui, comme les préraphaélites anglais, avait commencé sa carrière dans le style gothique ; le maître verrier, ébéniste et céramiste Emile Gallé ; l’artiste décorateur et ébéniste Louis Majorelle ; le décorateur et peintre verrier Jacques Gruber. Gallé, Majorelle et les frères Daum ne furent pas seulement des créateurs. Comme William Morris avant eux, ils furent des industriels talentueux.

 Les Galeries Poirel de Nancy consacrent une exposition temporaire à « Jacques Gruber et l’Art Nouveau, un parcours décoratif ». On y découvre le génie multiforme de cet artiste qui trouva sa voie dans l’art du vitrail au moment de l’éclosion de l’Art Nouveau et évolua vers un style toujours coloré mais plus abstrait.

 Il y a quelque chose de fascinant et envoûtant dans l’Art Nouveau. Rien ne choque. Tout enveloppe, protège, caresse. Dans les moments de doute, c’est un réconfort.

 Photo « transhumances » : vitrail de Jacques Gruber au Musée de l’Ecole de Nancy.