EconomieVoyages17 mars 20120Guadeloupe, bananeraie à Basse Terre

Bananeraie de la plantation Grand Café de Bel Air, Basse Terre

La visite de la Plantation Grand Café de Bel Air permet de découvrir les stratégies « raisonnées » d’une exploitation agricole tropicale.

 La Plantation Grand Café se situe dans les hauteurs de Sainte Marie, le site où Christophe Colomb débarqua lors de son deuxième voyage en 1493. Malgré son nom, elle est actuellement consacrée à la production de bananes pour l’exportation vers la métropole. Des caféiers vont être plantés prochainement afin d’élargir l’offre de la boutique du domaine.

 Le circuit se compose d’une visite de l’entrepôt de tri et de conditionnement des bananes, un tour commenté de la bananeraie à bord d’une charrette équipée de bancs et remorquée par un tracteur, et enfin la dégustation d’un vin moelleux de banane. Notre guide et conducteur est un passionné de ce qu’il appelle « l’agriculture raisonnée », passant progressivement vers un modèle plus respectueux de l’environnement et plus diversifié.

 

Entrepôt et centre de tri de la banane, Plantation Grand Café

La production de la banane d’exportation vers la métropole présente les caractéristiques les plus extrêmes de l’agriculture capitaliste : utilisation massive de pesticides, monoculture conduisant a l’épuisement des sols, sélection d’un unique produit au mépris de la diversité des saveurs, déconnexion totale entre le producteur et le consommateur, fluctuation du prix de vente sans relation avec le coût de production. Le consommateur français attend un produit d’un gabarit déterminé, mûr et sans tâche. Le produit, arrivé vert à Dunkerque, est stocké et porté maturité dans une mûrisserie. Il y est acheminé dans des navires frigorifiques réfrigérés une fois par semaine, à la température constante de 13ºC. Au domaine, il est trié et traité chimiquement contre les parasites.

 En amont, la bananeraie est organisée de telle sorte que chaque semaine arrive au centre de tri le tonnage de régimes de bananes souhaité, selon la qualité requise par le cahier des charges. Ceci implique un travail constant de surveillance du cycle de 9 mois pendant lequel le bananier se développe. En permanence, les regimes sont taillés pour ne conserver que les bananes au gabarit souhaité et les plants morts sont éliminés pour que se développent les surgeons. La bananeraie fait l’objet d’un contrôle sanitaire par une autorité indépendante qui, en cas de présence de parasites, ordonne le déversement par avion de pesticides. La piste d’aviation, une pente herbeuse face aux alizées, fait partie du domaine mais dessert toutes les exploitations de la région.

 Notre guide nous parle avec passion de la stratégie du domaine pour se rapprocher de l’agriculture biologique. Peu à peu, l’usage d’agents chimiques est supprimé ou limité dans toutes les phases du processus. Un bon exemple est l’alternance des sols entre bananeraie et canne à sucre. La canne à sucre épuise moins les sols. Par ailleurs, les parasites de la banane ne trouvent pas se nourrir avec la canne et disparaissent. En moyenne, l’épandage de pesticides a lieu trois fois par an, contre le double dans d’autres îles des Caraïbes, et tous les efforts sont faits pour en réduire l’utilisation.

 Le Domaine Grand Café n’est pas passé à l’agriculture biologique. Il faudrait sans doute pour cela que le consommateur français soit éduqué à gouter des bananes de calibres et de saveurs différents. Mais il travaille avec des producteurs biologiques dans d’autres pays, notamment Cuba, avec pour objectif de tendre progressivement vers un modèle de production plus sain. Le passage se fait progressivement, par étapes. Ce qui est remarquable, c’est qu’il répond à une stratégie à dix ans, murement réfléchie et, comme le dit notre guide, « raisonnée ».

Piste de l'aérodrome de la Plantation Grand Café

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