Méditerranée orientaleReligion8 avril 20230Fièvre de constructions religieuses à Chypre

Depuis sa partition en 1974, Chypre semble en proie à une fièvre de construction de mosquées au nord et d’églises au sud.

Dans la partie grecque de Nicosie, nous sommes impressionnés par l’ampleur de la cathédrale orthodoxe, inaugurée en 2022 après six ans de travaux et un budget estimé à 10 millions d’euros.

Cet immense édifice remplace un autre, tout petit, Saint Jean le Théologien, situé dans l’enceinte du palais de l’archevêché  orthodoxe. Il est édifié au milieu d’une vaste esplanade en marbre. L’iconostase (la paroi couverte d’icônes qui sépare le clergé des fidèles) a été réalisé par des artisans chypriotes. Les cloches ont été fabriquées en Pologne, les lustres en République tchèque, les mosaïques en Roumanie, les marbres en Grèce.

Mosquée de Didkarmaz, inaugurée en 1992

Dans la partie turque de l’île, des mosquées ont été construites au cours des dernières décennies dans les villes et les villages. Le nombre de minarets, un, deux ou quatre, indique leur importance.

Les responsables orthodoxes au sud, musulmans au nord, suivent une logique de puissance. L’investissement en lieux de culte indique qu’ils sont maîtres chez eux. La coexistence avec l’autre religion est crainte, jamais souhaitée, parfois tolérée.

Dans la partie nord (turque) de Nicosie, près de la porte de Kyrenia, se visite le musée Mevlevi. Ses bâtiments du dix-septième siècle gardent la mémoire d’un « Tekke », une communauté de disciples du mystique Mevlana Celaleddin Rumi, qui s’était établi à Konya (Turquie) au treizième siècle et dont l’influence s’était étendue à toute l’Asie mineure.

Musée Mevlevi, salle de danse transcandentale

Le Tekke était un lieu de recherche spirituelle, par la pratique des prières rituelles de l’islam et par la danse transcendantale connue comme celle des derviches tourneurs. Il avait aussi un rayonnement social, fournissant des repas aux pauvres, gérant un orphelinat et dispensant de l’enseignement.

Ce qu’on visite aujourd’hui, c’est la salle de danse, une pièce consacrée à la préparation et à la consommation des repas ainsi que, dans une longue pièce dont le toit est constitué d’une succession de petits dômes, les tombes de Cheikhs ayant dirigé le Tekke. Ceci ne représente qu’une petite partie des bâtiments anciens. La majeure partie a été détruite en 1970 pour laisser la place à un centre commercial.

L’ordre Mevlevi est une composante du soufisme, ce courant de pensée qui développe une interprétation spiritualiste de l’islam. L’un de ses préceptes est « ceux qui aiment Dieu n’ont d’autre religion que Dieu lui-même. » L’une de ses vertus cardinales est la modestie. On comprend que les constructeurs acharnés de cathédrales et de mosquées l’aient relégué au statut de musée.

Musée Mevlevi, tombeaux des cheikhs

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