Meurtre en prison

La presse a relaté le meurtre d’un homme dans sa cellule par son codétenu le 14 juin au centre pénitentiaire de Rennes-Vezin.

 Le calvaire de cet homme a duré plusieurs jours. L’enquête policière a relevé sur son corps de nombreuses lésions, au visage, au tronc et aux jambes, des brulures aux pieds et dans le dos ainsi que les signes de fractures de côtes et d’un pneumothorax.

Le tortionnaire, codétenu de la victime, a reconnu les faits. Il a indiqué que son codétenu souffrait d’encoprésie, une forme d’incontinence fécale. Il ne supportait plus ses odeurs. Il avait demandé de changer de cellule, puis avait brutalisé son compagnon de cellule à plusieurs reprises pendant plusieurs jours, jusqu’à le tuer.

Cette situation illustre à l’extrême l’indignité des conditions de détention. Le détenu victime d’incontinence aurait dû être placé dans une cellule individuelle ; il aurait fallu éviter de placer à ses côtés un détenu violent. Mais le degré se surpopulation carcérale réduit drastiquement les marges de manœuvre de l’administration pénitentiaire.

Cette horreur banale dans une prison banale s’ajoute aux horreurs qui nous assaillent chaque jour, de Gaza, d’Ukraine ou du Soudan. Un crime sordide dans une cellule de prison parce que l’air est irrespirable nous semble relever de la fatalité. Mais il y a quelque chose de spécifique dans la perception de la prison par l’opinion publique.

Il y a d’abord le sentiment que les prisonniers appartiennent à une autre monde, celui des malfaisants opposé à celui des gens honnêtes. Beaucoup sont convaincus que le choc carcéral est salutaire, et que plonger en enfer des hommes en délicatesse avec la loi les incitera à revenir dans de droit chemin. La culture chrétienne, qui insiste sur la valeur rédemptrice de la souffrance, affleure peut-être sous notre addiction à la prison, et à une prison sans espace pour le plaisir.

Aucune étude scientifique n’a jamais étayé l’idée que des conditions de détention indignes faciliterait un retour apaisé dans la société et réduirait le risque de récidive. C’est même l’inverse :  l’oisiveté, la frustration et la colère alimentent le ressentiment et rendent difficile la réinsertion.

Inciter les citoyens à faire preuve de compassion à l’égard des prisonniers est un message généreux. Peut-il être entendu dans le flot tonitruant des préjugés ? C’est probablement l’inefficacité de la prison, son échec à améliorer la sécurité entre les citoyens alors qu’elle mobilise des ressources colossales, qu’il faudra mettre en avant pour que la priorité soit donnée à l’insertion des personnes détenues plutôt qu’à leur enfermement à tout prix.  Alors, pourraient être évités des drames tels celui de Rennes-Vezin.

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