Dans les villes comme dans les campagnes de Chypre du nord, le voyageur est frappé par le nombre d’édifices en ruine, ou dans une phase de construction qui semble ne jamais devoir s’achever.
D’innombrables squelettes de béton s’insèrent dans le paysage. Ils délimitent les arêtes de parallélépipèdes dont l’intérieur est vide, béant.
Il semble que beaucoup d’immeubles aient été abandonnés par leurs propriétaires chypriotes grecs en 1974, lorsqu’ils durent s’exiler au sud de l’île pour fuir la guerre. Leur statut juridique restant en suspens, ils ont été squattés ou bien laissés vacants, laissant le temps les grignoter peu à peu.
D’autres structures vides sont plus récentes. Des familles ont acheté un bout de terrain et marqué leur territoire en élevant une carcasse de béton. Elles y nicheront leur logement lorsqu’elles disposeront des fonds pour cela. Parfois, elles parviennent à bâtir le rez-de-chaussée. Des supports métalliques dépassent des piliers de la construction, en vue du rehaussement qu’on espère pour l’avenir.
La crise du Covid a frappé. De grands projets immobiliers, notamment dans le secteur touristique, ont eu un commencement d’exécution et se sont arrêtés, probablement pour toujours.
Enfin, sur certains chantiers des équipes s’activent, on amène des briques, des grues lèvent de lourdes charges. Bientôt la béance des structures de béton sera comblé. La construction deviendra habitat.