Dans un livre d’entretiens avec le musicologue Frédéric Gaussin, Jean-Claude Casadesus, chef d’orchestre et directeur de l’Orchestre National de Lille, livre une réflexion passionnante sur sa vie, sa carrière et son métier (« La partition d’une vie », Editions Ecriture, 2012).
La famille Casadesus constitue une véritable dynastie de musiciens et de comédiens issue d’un même ancêtre, Luis Casadesus, un émigré catalan décédé en 1919 à l’âge de soixante neuf ans. Jean-Claude Casadesus appartient à la troisième génération. Il est fils de Gisèle Casadesus, comédienne qui vient, à 99 ans, de jouer dans le film « le figuier ». Il est père d’un explorateur, d’une cantatrice et d’un comédien, et grand-père de trois musiciens doués. Continuer la lecture de « La partition d’une vie »
Dans « Autumn » (Collection Folio, 1990), Philippe Delerm évoque le groupe des préraphaélites dans la période qui va de décembre 1850 à octobre 1869.
Au centre du livre se trouve Dante Gabriel Rossetti. Lorsque commence le récit, il a 22 ans. Deux ans auparavant, il a créé avec William Holman Hunt et John Everett Millais, sous le mystérieux sigle « PRB », the Preraphaelite Brotherhood, la fraternité préraphaélite.
Dante Rossetti est un homme de l’automne. Il aime passionnément la couleur rousse, celle des feuilles qui tombent, celle de la chevelure des femmes qu’il aime : Elizabeth (Lizzie) Siddal, qui sera pour elle la Béatrice de Dante, Fanny Costforth, la belle et voluptueuse prostituée, Jane Burden Morris, un modèle de beauté sauvage. Il aime aussi le côté crépusculaire de l’automne. Rossetti déteste le bonheur : il pense que l’art ne peut aller de pair qu’avec la proximité de la mort. Il mène une vie de débauche qui met sa santé en péril. Lizzie devient sa femme alors qu’elle a déjà contracté la tuberculose qui l’emportera.
“The Memory of Love” (le souvenir de l’amour), d’Aminatta Forna, est un roman bouleversant dont le cadre est un pays ravagé par une féroce guerre civile encore toute récente.
Aminatta Forna dit d’elle-même qu’elle est née en Ecosse, a grandi en Sierra Léone et en Grande Bretagne et a passé des périodes de son enfance en Iran, en Thaïlande et en Zambie. Elle a écrit trois romans, dont « The Memory of Love », publié en 2010. C’est un livre de plus de 400 pages dont les personnages principaux sont un pays, la Sierra Leone, un jeune chirurgien sierra léonais, Kai Mansaray, et un psychiatre anglais, Adrian Lockheart. Continuer la lecture de « The memory of love »
Après avoir écrit une impressionnante biographie de William Morris, dont « transhumances » a donné une note de lecture, Fiona MacCarthy s’attaque à l’un des peintres majeurs de l’époque victorienne, Edward Burne Jones (1833 – 1898). Sa biographie de 629 pages, publiée en 2011, a pour titre : « le dernier préraphaélite, Edward Burne Jones et l’imagination victorienne »
Edward Burne Jones a été un artiste exceptionnellement prolifique. Il a exercé son talent en peinture et, dans le cadre de l’entreprise d’arts décoratifs de William Morris, en tapisserie, lithographie et vitrail. Beaucoup de ses œuvres ne nous parlent guère aujourd’hui : celles inspirées des légendes de chevalerie et du Roi Arthur eurent leur moment d’engouement patriotique pendant la première guerre mondiale ; les jeunes filles épanouies dans leurs longues robes ont parlé à la culture hippie des années soixante. Mais d’autres œuvres, en particulier ses portraits, dénotent un sens de la psychologie exceptionnel.
Burne Jones était un émotif. A plusieurs reprises, le stress du travail ou des contrariétés personnelles le plongèrent dans une profonde dépression. Ses portraits sont personnels, emprunts d’une forte sentimentalité.
Son destin a été parallèle à celui de William Morris (1834 – 1896). Ils ont eu une collaboration artistique tout au long de leur vie, associés dans leur jeunesse à la fraternité des préraphaélites. Morris était celui qui donnait aux objets pensés par Burne Jones une réalité physique et commerciale. Mais personnellement ils étaient différents : Morris, né dans une famille d’agent de change, vira progressivement au socialisme ; Burne Jones, de condition modeste, accepta les honneurs, en particulier le titre de baron, et se désintéressa de la politique. L’un et l’autre voulaient produire de la beauté, et pensaient que ce faisant ils affrontaient un problème de société : la misère écœurante des prolétaires, le cancer de la pollution, l’oubli des racines spirituelles de l’Angleterre. Mais Burne Jones considérait que l’artiste devait consacrer toute son énergie à son art, alors que Morris était, avant l’heure, un « intellectuel engagé ». Curieusement, Georgina, l’épouse de Burne Jones, grandie dans une stricte obédience méthodiste, prit le relais de l’engagement politique de Morris après sa mort.
Fiona MacCarthy suit pas à pas le parcours de Burne Jones, son adulation pour son maître John Ruskin, la crise de son couple lorsqu’il eut une relation passionnée avec la jeune Grecque, Maria Zambaco. Elle nous montre ses domiciles de Londres, la Grange à Fulham, et celui de Rottingdean près de Brighton, devenir progressivement un lieu de rassemblement de tout ce que l’Angleterre et le Continent comptaient d’artistes visuels. Elle nous montre aussi la vie familiale de Burne Jones, dont Rudyard Kipling était le neveu.
L’auteur nous montre un homme humain, dans la fécondité artistique comme dans ses faiblesses, et aussi comme un homme drôle. Toute sa vie, Burne Jones a dessiné des histoires pour les enfants et des caricatures pour ses amis. Leur reproduction dans le livre est particulièrement émouvante.