Cinéma21 mars 20220Ils sont vivants

Dans « Ils sont vivants », Jérémie Elkaïm met en scène l’histoire d’amour entre une Calaisienne et un Iranien cherchant sa route vers l’Angleterre.

Le film est inspiré de « Calais mon amour », le récit par Béatrice Huret de sa propre histoire. Béatrice (interprétée par Marina Foïx) vit avec sa mère et son fils adolescent dans un pavillon de la périphérie de Calais. Son mari, policier, de vingt ans plus âgé qu’elle, vient de décéder. Elle est aide-soignante dans un Ehpad.

Tout l’incite à la méfiance vis-à-vis des migrants. Mais quand elle heurte accidentellement un Soudanais perdu sur le parking de l’Ehpad et qu’elle le ramène « chez lui » dans la « jungle », l’univers qu’elle découvre la fascine. Par curiosité, elle accepte de rendre de menus services.

Peu à peu, elle intègre l’équipe des bénévoles qui s’acharnent à rendre la vie plus facile aux hommes et aux familles qui ont échoué là, avec le projet de se glisser dans un camion qui leur fera traverser la Manche. Certains les aident même dans ce projet, au risque de poursuites judiciaires.

Peu à peu, son domicile est envahi par des bénévoles et des migrants, ce qui provoque des tensions avec sa mère et son fils, dont l’espace personnel est piétiné. Béatrice met à la porte sans ménagement Ingrid (Laetitia Dosch), une responsable bénévole qui a eu l’impudence de coucher avec l’un d’entre eux.

Mais quand Mokhtar (Seear Kohi), un enseignant iranien émigré, est hébergé chez elle, l’attirance réciproque est immédiate. Béatrice ne parle pas anglais, Mokhtar ne parle pas français. Ils utilisent le logiciel de traduction du smartphone. Questions et réponses mettent des secondes à se formuler. La femme et l’homme se dévorent du regard. Plus tard, l’exploration de leurs corps fera aussi sa part à l’attente et au temps.

« Quand j’ai compris que je pouvais traiter cette histoire de façon incarnée et intime, faire vivre les échanges de regard et l’attirance à fleur de peau des personnages, dit Jérémie Elkaïm, je me suis dit que ça permettrait de mettre le politique dans la chair et l’inconscient du film (…) Je tenais par-dessus tout à l’incarnation. L’incarnation des personnages, des deux principaux aux plus petits. »

 Le projet de Mokhtar, partir faire sa vie en Angleterre, heurte de plein fouet celui de Béatrice, qui aimerait retenir son amant et en faire son mari. Mais aimer, n’est-ce pas permettre à l’autre de tracer sa propre route, comme le dit la chanson de Julos Beaucarne :

Comment puis-je te dire mon amour

Personne n’est à moi que je sache

Je m’appartiens à certains jours

Quand nul, ni rien ne m’attache

Je voudrais te laisser couler

Sans jamais faire de barrage

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