Une histoire d’amour et de désir

Arte TV a récemment diffusé « une histoire d’amour et de désir », film réalisé en 2019 par Leyla Bouzid qui raconte la difficulté, pour un jeune homme issu de l’immigration algérienne, à s’engager dans une relation amoureuse.

 Ahmed (Sami Outalbali), qui vit avec ses parents et sa sœur en grande banlieue parisienne, s’est inscrit à la Sorbonne en licence de lettres, avec un cours sur la littérature arabe. Il s’éprend d’une camarade, Farah (Zbeida Belhajamor), à peine arrivée de Tunisie.

 

Il accepte de lui servir de guide dans Paris, ville qu’à vrai dire il ne connaît pas davantage qu’elle. Farah se découvre amoureuse d’Ahmed, elle est prête à se donner à lui. Mais lorsque les corps se rapprochent, Ahmed prend peur et se refuse.

La différence de classe explique en partie le vertige qui le saisit. Sa mère fait des ménages la nuit, son père est « un chômeur de plus », lui-même gagne un peu d’argent comme déménageur intérimaire. Farah vient de la bourgeoisie tunisienne.

 Le fossé est culturel. Ahmed ne parle pas arabe, ses parents ont tourné le dos au passé, tout misé sur l’intégration à la société française. S’il s’est inscrit au cours de Madame Morel (Aurélia Petit) sur la poésie érotique arabe, c’est poussé par la curiosité. Mais ce qu’il apprend ajoute à son trouble : dans les grands textes du Moyen-Âge arabe, il est certes question de jouissance, mais aussi de la beauté du désir tant qu’il reste inaccompli.

 Lassée des doutes de l’homme qu’elle aime, Farah rompt avec lui, mais lui adresse un poème en arabe. Ahmed cherche en vain qui pourra le lui traduire, et c’est son père, journaliste ayant dû fuir l’Algérie en raison de la guerre civile, qui joue le rôle de traducteur. La chaîne de transmission de la culture est restaurée. Ahmed peut faire la paix avec lui-même et faire l’amour avec Farah.

 La réalisatrice Leyla Bouzid souligne que beaucoup de films évoquent la fragilité féminine, et peu la vulnérabilité des jeunes hommes face à des partenaires femmes qui savent mieux qu’eux ce qu’elles veulent. Le comportement d’Ahmed exaspère : comment peut-il, comme on le lit sur le site d’Arte, « s’interdire de succomber au désir qui l’embrase » ? Le spectateur est pris à témoin de sa souffrance et du chemin qui lui permettra de s’émanciper.

 

Les Contemplées

Dans « Les Contemplées » (la Manufacture des livres, février 2023), la romancière Pauline Hullier s’inspire de l’expérience vécue par elle il y a dix ans à la prison pour femmes de Tunis.

 A la suite d’une manifestation féministe, Pauline Hullier fut placée en garde à vue puis incarcérée à la prison de la Manouba dans une cellule d’une trentaine de mètres carrés comprenant vingt-huit détenues. Continuer la lecture de « Les Contemplées »

Le bleu du caftan

Dans « le bleu du caftan », la réalisatrice Maryam Touzani parle de l’amour d’un artisan tailleur pour son métier, d’une homosexualité bridée et réprimée par les préjugés sociaux, d’une mort annoncée et d’un deuil douloureux.

 Halim (Saleh Bakri) est considéré comme un « maalem », un maître dans son art, la confection de vêtements de satin finement brodés, en particulier des caftans portés par les femmes de la bourgeoisie marocaine. Il a hérité de son père une boutique au cœur de la Médina. Il est amoureux des tissus et passionné par son métier, qu’il exerce avec tant de souci de la perfection que les commandes sont en retard et que l’argent tarde à rentrer. Continuer la lecture de « Le bleu du caftan »

Beyrouth-sur-Seine

Dans « Beyrouth-sur-Seine » (Stock 2022), Sabyl Ghoussoub raconte l’exil à Paris de ses parents, empêchés de rentrer au pays par la guerre civile (1975 – 1990) et par ses séquelles jusqu’aujourd’hui. Son récit a obtenu le prix Goncourt des lycéens.

Le livre oscille entre les années de guerre et la période récente, marquée par la révolte des jeunes d’octobre 2019 et l’explosion qui a détruit le port de Beyrouth le 4 août 2020. La colère affleure : « je suis très en colère, par les victimes de l’explosion du port, qui malheureusement sont complètement délaissées, par les victimes de la crise économique, par ces massacres pendant la guerre du Liban qui n’ont pas encore été jugés, » dit l’auteur à France Info. Continuer la lecture de « Beyrouth-sur-Seine »