CinémaHistoire9 août 20230Le refuge du dernier président

Arte TV propose en replay « Le refuge du dernier président » (Honecker und der Pastor), téléfilm de Jan Josef Lifers (2022). Il raconte les quelques semaines qu’Erich Honecker et son épouse Margot passèrent chez un pasteur protestant après leur éviction du pouvoir.

 En 1990, Uwe Homer (Hans-Uwe Bauer) est pasteur de Lobetal, un village tranquille au nord de Berlin, dans ce qui était encore la République Démocratique Allemande, l’Allemagne de l’Est. Beaucoup de ses paroissiens sont les pensionnaires de l’hôpital psychiatrique voisin. Il vit dans un vaste presbytère avec sa femme Sigrid (Stefi Kühnert) et deux de leurs six enfants, Traugott et Kornelius, de treize et seize ans environ.

 Uwe et Sigrid ont accepté d’accueillir au sein de la famille Erich Honecker (Edgar Selge), ancien secrétaire général du parti communiste, malade et menacé d’un procès pour haute trahison, et son épouse Margot (Barbara Scnitzer), ancienne ministre de l’Éducation.

La situation flirte avec l’absurde. Honecker, marxiste athée, a combattu les églises et soumis leurs membres à la surveillance de sa police politique, la Stasi. L’Église protestante, en retour, a joué un rôle moteur dans les manifestations populaires qui ont abouti à la chute du dictateur et du mur de Berlin.

 Ce qui motive le pasteur, c’est l’exigence évangélique d’accueil de ceux qui souffrent, quels qu’ils soient et quelques méfaits qu’ils aient pu commettre. Il reçoit des dizaines de lettres, la plupart indignées par son attitude, certaines porteuses de menaces de mort.

 À l’extérieur du presbytère, une foule vociférante exige le retour d’Honecker en prison. Le pasteur est interviewé à la télévision. Une jeune spectatrice se lève et explique qu’elle a été envoyée dans un centre de redressement du régime et qu’il lui est impossible de pardonner.

Après plusieurs semaines en deux séjours au presbytère, Honecker est finalement autorisé à rejoindre sa famille au Chili pour y finir ses jours. Il ne sera pas jugé, en raison de son âge et de sa santé défaillante.

 « Le refuge du dernier président » est un film émouvant qui met en exergue des valeurs qui divisent, encore aujourd’hui : le pardon et l’accueil. Le pardon semble appartenir à un horizon de plus en plus lointain alors que triomphe la culture sécuritaire du « eux » et « nous », « eux », les malfaisants, devant être enfermés le plus longtemps possible. L’accueil est peut-être encore plus problématique. Face à l’afflux des exilés, l’heure est aux murs et aux frontières.

 Le film de Josef Lifers rend hommage à un couple qui, malgré la fureur ambiante, n’a pas transigé avec ces valeurs.

Commenter cet article

Votre email ne sera pas publié.