CinémaDestins29 juillet 20230Rheingold

Dans Rheingold, le réalisateur allemand Fatih Akin transpose au cinéma l’autobiographie de Giwar Hajabi, devenu une star du rap allemand sous le nom de Xatar (« dangereux » en kurde, sa langue natale).

Rheingold, c’est l’Or du Rhin, opéra de Wagner qui faisait partie de l’univers mental de son père, compositeur et chef d’orchestre, Kurde d’Iran, immigré en Allemagne. C’est aussi le butin d’un braquage audacieux que, devenu mafieux, Giwar (Emilio Sakraya) réussit et qui lui vaut plusieurs années de prison.

« Quel est ton premier souvenir dans la vie ? demande-t-on à Giwar. Moi, c’est la prison » Une prison en Irak, où il est enfermé avec ses parents  après qu’ils ont fui Téhéran et le régime des mollahs. Une prison surpeuplée et insalubre, où son père est torturé et dont il sera sauvé par la Croix-Rouge française. Une prison où le petit garçon s’éveille à la conscience. Une trentaine d’années plus tard, c’est dans une prison allemande qu’il naîtra de nouveau, comme rappeur, réconciliant ainsi la culture musicale héritée de ses parents et son expérience d’un monde violent.

 

 

La naissance de Giwer est traumatique. Sa mère accouche seule dans une grotte où elle s’est réfugiée pour se protéger d’un bombardement. C’est ensuite une vie de réfugiés que mène la famille, d’abord à Paris, puis à Bonn, avec comme fil rouge la musique. Donner à Giwar des cours de piano est pour sa mère incontournable, malgré la pauvreté.

Autre traumatisme : l’abandon de la famille par son père. Pour Giwar, gagner de l’argent devient une obsession. Il devient dealer dans son quartier à Bonn, puis videur de boîtes de nuit à Amsterdam où son intrépidité le fait remarquer et adopter par un parrain local. Il découvre la musique électronique et le rap, rêve d’en faire son métier. Mais c’est vers le grand banditisme que le porte le cours des choses, puis vers  la prison et, en prison, la rédemption.

Le film de Fatih Akin comporte de multiples facettes : l’histoire de musiciens de père en fils, un récit de guerre et d’exil, l’apprentissage des relations de pouvoir par la force dans un « quartier », l’entrée dans le cercle proche d’un parrain mafieux émule de Vito Corleone, un braquage sous un déguisement de policiers, une histoire d’amour ?

La performance de l’acteur principal, Emilio Sakraya, est remarquable. « La peur ne le paralyse jamais, dit le réalisateur. Au contraire, elle le rend encore plus vif. Emilio a sa méthode. Pendant des mois, il se donne à fond pour se préparer, cherche à se glisser dans le rôle, corps et âme. » Pour jouer ce rôle, il s’est entraîné physiquement deux heures par jour jusqu’à prendre 16 kg  de muscles. La scène où il fait face à un videur qui braque un révolver sur son front est impressionnante. « Il y avait une caméra de surveillance, il n’aurait pas pu tirer », dit Giwar. Emilio incarne parfaitement son personnage.

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