CinémaTélévision28 novembre 20150Les heures souterraines

Arte TV a récemment diffusé « les heures souterraines », magnifique téléfilm adapté par Philippe Harel du roman éponyme de Delphine de Vigan.

Il y a trois personnages principaux dans ce film. L’un est une femme d’environ 35 ans, Mathilde (Marie-Sophie Ferdane), veuve depuis huit ans, qui élève seule ses trois garçons et travaille comme directrice du marketing d’une entreprise. L’autre est un homme du même âge, Thibault (Mehdi Nebbou), qui travaille comme médecin généraliste chez SOS Médecins et traverse Paris au volant de sa voiture d’un rendez-vous à l’autre.

Le troisième personnage est la ville elle-même. Philippe Harel nous la décrit comme un lieu lent. On attend, entassés, sur un quai de métro. On patiente devant une barrière de parking qu’un gardien mal léché refuse d’ouvrir. On piétine devant des interphones en recherchant le code que l’on a noté quelque part.

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Eric Savin, Anne-Sophie Ferdane

La ville est d’autant plus lente que les autres personnages sont en panne. Nous sommes lundi matin. Au retour d’un weekend désastreux, Thibault vient d’annoncer à sa copine qu’il n’en pouvait plus et qu’il la quittait : « merci pour tout », lui a-t-elle seulement répondu. Quant à Mathilde, elle découvre que son chef, Jacques (Éric Savin), a fait déménager ses affaires dans un bureau placard sans fenêtre et a mis en place sa remplaçante. Depuis des mois, elle était peu à peu ostracisée et harcelée par son chef, qui pour une raison inexpliquée la poussait vers la démission. J’ai voulu, dit Delphine de Vigan, « raconter son sentiment de faire soudain partie des lents ».

Mathilde est attaquée au plus profond d’elle-même, elle reste debout par dignité et par souci de ses enfants, mais elle est au bord du KO et du burnout. Thibault passe ses journées à panser les plaies de la solitude urbaine. Cette histoire de deux solitudes urbaines, celle de deux personnages « destinés l’un à l’autre mais qui passent leur temps à se rater », dit Philippe Harel, est profondément triste jusqu’au tout dernier moment. Dans le métro, Mathilde et Thibault sont assis l’un face à l’autre. Il la regarde. En voix off, ils se racontent l’un à l’autre leur journée au fond du trou, leurs heures souterraines. Ils se disent « tu » et on comprend que la rencontre a, finalement, eu lieu.

J’ai découvert par ce téléfilm l’actrice Marie-Sophie Ferdane, absolument remarquable. Agrégée de lettres modernes, diplômée de violon et de chant, diplômée de théâtre, comédienne et metteure en scène, elle est visiblement dotée d’une personnalité exceptionnelle.

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Anne-Sophie Ferdane

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