Cinéma29 décembre 20220Les bonnes étoiles

Réalisé en Corée par le Japonais Hirokazu Kore-eda, « Les bonnes étoiles » chemine avec virtuosité sur le chemin de crête entre tragédie et comédie.

 Sang Hyun (Song Kang-ho, prix d’interprétation masculine au Festival de Cannes 2022) et Dong So (Dong-won Gang) sont associés dans un business lucratif : le rapt et la vente de bébés et de tout jeunes enfants.

 Un soir de pluie, une jeune femme (Lee-Ji-eun) porte son bébé jusqu’à une église et à sa « boîte à bébés », un dispositif pour recueillir des nouveau-nés voués à l’abandon. La jeune femme ne va pas au bout de son geste : elle dépose l’enfant sur le sol, au risque qu’il périsse de froid. Une aubaine pour les trafiquants. Ils se saisissent de l’enfant et se mettent activement à la recherche d’un couple près à payer 20 à 40 millions de wons (15 à 30 000€) une adoption sans délai et sans formalités.

Les deux associés se mettent en route jusqu’à l’autre bout du pays à bord d’un van à bout de souffle. Ils sont parvenus à convaincre la mère de se joindre à eux, en lui promettant une partie du magot. Ce qu’ils ignorent, c’est qu’ils sont filés par deux policières qui cherchent à les prendre en flagrant délit de trafic. Et qu’elles-mêmes sont menacées d’être doublées par d’autres policiers qui enquêtent sur un assassinat mettant en cause la mère du bébé.

 La fine équipe échoue pitoyablement avec son premier couple de clients, mais parvient à déjouer le piège mis en place par les policières avec des comédiens se faisant passer pour des clients potentiels. Dans ces scènes, Kore-eda tire sur la fibre comique.

 On s’arrête dans un orphelinat, où l’on découvre que Dong So a, lui aussi, été abandonné à la naissance. Un gamin de 10 ans se glisse dans la voiture, et c’est une « presque famille », avec deux pères potentiels, une mère, un bébé et un gamin qui continue son périple par les magnifiques montagnes de Corée.

Je retiens de ce film deux scènes sublimes. Dong So et la mère du bébé abandonné, So-young, se font face dans une cabine de la grande roue d’un parc d’attraction. On n’entend que le bruit des câbles au passage des pylônes. Je ne peux pas pardonner à ma mère, dit Dong So à So-young, mais à toi je te pardonne. Une déclaration d’amour.

La « presque famille » est rassemblée dans une chambre d’hôtel. C’est la fin de leur histoire. So-Young va être arrêtée. À chacun, un par un, elle dit « merci d’être né ». C’est poignant. L’abandon comme nettoyé par une pluie de tendresse.

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